Fête de l’Épiphanie – Année A – Dimanche 5 janvier 2019 – Évangile de Matthieu 2, 1-12

ÉVANGILE DE MATTHIEU 2, 1-12

L’ÉPIPHANIE ou LA MANIFESTATION

Ils n’étaient pas rois, ils n’étaient pas trois, ils ne s’appelaient pas Gaspard, Melchior et Balthazar et il est tout à fait vain de se perdre dans des calculs astronomiques pour découvrir en quelle année une comète a filé dans le ciel du Moyen-Orient pour servir de GPS à ces braves voyageurs. Quant au gâteau des Rois, nous y goûterons un plaisir gastronomique mais la découverte de la fève ne nous offrira qu’une éphémère royauté de pacotille.

Voilà, comme les autres fêtes chrétiennes, à quel niveau de folklore et d’enfantillage est tombée une célébration qui a une signification beaucoup plus profonde. Alors si vous ne croyez plus en tous ces détails, ne pensez pas que vous avez perdu la foi: vous êtes bien plutôt en chemin pour la découvrir.

LES PAÏENS VOIENT LE MESSIE QU’ISRAEL NE VOIT PAS

Tous les souverains de l’antiquité s’entouraient de vagues savants, de prophètes et de visionnaires qui prétendaient percevoir les signes de l’avenir et ainsi permettre au pouvoir de prendre des décisions avisées. L’un d’eux nommé Balaam est célèbre, il est cité dans la Bible et il avait annoncé jadis: “ Oracle de l’homme à l’oeil perçant et qui entend les paroles de Dieu. Je le vois mais pas pour maintenant: d’Israël monte une étoile, de Jacob un dominateur” (Nombres 24,17). L’oracle d’un prophète païen entretint pendant des siècles l’espérance d’Israël en un Grand Souverain.

Or, raconte Matthieu, au temps de la naissance de Jésus, dans un pays d’Orient (Perse, Arabie, ???), des mages assurèrent avoir vu un tel signe et, sur l’ordre de leur roi, ils se mirent en route pour se rendre au palais de Jérusalem afin de rendre hommage au nouveau petit prince.

Stupeur à la Cour car il n’y a pas de naissance royale. Alors on comprend: il doit s’agir du fameux Messie, l’”étoile” entrevue par Balaam et que tant de prophètes avaient annoncé depuis lors. Le comité des exégètes se réunit et, en spécialistes des Écritures, ils peuvent tout de suite indiquer le lieu de son apparition:

“ C’est à Bethléem de Judée, car c’est ce qui est écrit par le prophète: “Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n’es certes pas le plus petit des chefs lieux de Juda” (Michée 5, 1).
En outre, il était aussi écrit: “Car c’est de toi que sortira le chef qui fera paître Israël mon peuple”(2 Samuel 5, 2, qui était une promesse adressée à David)

Puisqu’ils sont certains de la réponse, les autorités juives devraient se hâter de monter un beau cortège pour aller honorer, avec leurs visiteurs, ce fameux Messie né dans ce petit village bien connu. Or au contraire, le roi se limite à renseigner les mages sur la route à prendre et lui-même refuse de se déplacer.

Les mages, eux, sont décidés à aller jusqu’au bout de leur recherche; la mystérieuse étoile réapparaît et “Ils éprouvèrent une très grande joie” – Signe, comme pour les bergers de Luc, de la découverte de la vérité du Sauveur.

“Dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère, ils se prosternèrent et lui offrirent de l’or, de l’encens et de la myrrhe”.

Cadeaux à valeur symbolique: l’or pour un Roi, l’encens pour la prière à un Dieu, la myrrhe, parfum de l’amour et aromate pour l’ensevelissement. Les présents signifient l’identité de cet enfant et prédisent son destin.

“Puis divinement avertis en songe de ne pas re tourner auprès d’Hérode, ils se retirèrent dans leur pays par un autre chemin”.

L’attitude sournoise du roi les avait déjà inquiétés: la prière maintenant les persuade de ne pas aller le renseigner comme il le demandait. Aussi repartent-ils par une autre route.

AVEUGLEMENT ET ÉPIPHANIE

Matthieu ne s’est évidemment pas contenté de conter une gentille anecdote intéressante pour les marchands de santons et les pâtissiers. Cette histoire montre en effet un grand drame – l’aveuglement d’Israël -, et une Bonne Nouvelle: la découverte du Messie juif par les païens.

En dépit de tous ses efforts, Jésus ne réussira pas à se faire reconnaître comme le Messie. Si quelques disciples – et avec quelle peine !- se sont attachés à lui, le peuple ne demandait que des guérisons et la santé: or Jésus exigeait une guérison plus profonde, la conversion du coeur, le changement de vie et on y rechignait. D’autres guettaient le signe d’une insurrection armée et d’un affrontement guerrier contre l’armée romaine: et Jésus se refusait absolument à recourir à la violence. Quant aux autorités religieuses, tout de suite elles se méfièrent de cet inconnu et le grand tribunal du sanhédrin décida son exécution.

Il fallut l’Épiphanie de Pâques, la manifestation du Ressuscité pour qu’enfin les yeux des disciples s’ouvrent et découvrent que Jésus était bien le Messie et que les Écritures s‘étaient réalisées. Éclairés par l’Esprit, les apôtres se mirent à expliquer la nouvelle interprétation mais rien n’y fit: on leur défendit de prêcher, on les jeta en prison, certains furent mis à mort.

Alors ils se tournèrent vers les païens, Barnabé partit à Chypre, Paul en Macédoine, en Grèce, en Galatie et des conversions s’effectuèrent, des petites communautés naquirent au sein d’une société idolâtre et païenne. Le dernier envoi de Jésus s’accomplissait avec une vitesse fulgurante: “ Allez, de toutes les nations faites des disciples…” (Matt 28, 19)

Trois fois hélas en 3 ou 4 siècles, la coupure s’élargit et il y eut judaïsme et christianisme, séparés et ennemis.

Il faut relire les 3 chapitres 9 à 11 de la Lettre aux Romains où Paul pleure cet aveuglement de ses frères et découvre un sens à ce drame. “Dieu n’a pas rejeté son peuple…Il y a un reste…Grâce à la faute de beaucoup, les païens ont accédé au salut…Je ne veux pas que vous ignoriez ce mystère: l’endurcissement d’une partie d’Israël durera jusqu’à ce que soit entré l’ensemble des païens…Car les dons et l’appel de Dieu sont irrévocables…”

POUR QUI L’ÉPIPHANIE AUJOURD’HUI ?

Aujourd’hui à nouveau la situation se répète car on n’arrête pas le dessein de Dieu. Frappée par la sécularisation et la cupidité de la consommation, l’Europe peut transmettre au monde une foi dont elle se détourne. Et en beaucoup de pays d’Afrique et maintenant en Chine, dans la pauvreté, la persécution et le risque des attentats meurtriers, les conversions se multiplient, les nouvelles communautés se fondent et exultent de “la grande joie” de suivre la lumière du Sauveur.

Quand Jérusalem ne reconnaissait pas son messie, il se manifestait aux païens. Quand Paris, Bruxelles et Berlin abandonnent la foi, des pauvres des bidonvilles d’Ethiopie, du Laos et de Mongolie sont tout heureux de découvrir la nouvelle étoile, “ils prennent un autre chemin” qui les guide sur les chemins de la charité et de l’espérance. Les païens voient ce que nous ne voulons plus voir. Où sera la Vie demain ?

Frère Raphaël Devillers, dominicain

Au Nigeria, un nouveau massacre de chrétiens

Le groupe djihadiste État islamique en Afrique de l’Ouest a diffusé le 26 décembre une vidéo montrant l’exécution, dans le nord-est du Nigeria, de onze hommes présentés comme des chrétiens. Ces assassinats viennent s’ajouter aux nombreuses exactions commises dans le pays contre des chrétiens par des djihadistes.

C’est « un message [adressé] aux chrétiens du monde entier » en pleine période de Noël, assure un homme au visage masqué dans une vidéo diffusée jeudi 26 décembre par Amaq, l’agence de propagande de l’État islamique. Tournée dans un lieu non-identifié, elle montre l’exécution de onze hommes, présentés comme chrétiens, dans le nord-est du Nigeria. Les yeux bandés, ils sont exécutés par balle puis décapités. Le djihadiste y explique que les hommes qui viennent d’être abattus l’ont été en représailles de la mort d’Abou Bakr al-Baghdadi, chef de l’EI, tué en octobre, en Syrie, lors d’une intervention américaine.

Si la scène est glaçante, elle est malheureusement loin d’être inédite. Il y a un an, en janvier 2019, l’ONG Portes ouvertes affirmait déjà que 90% des chrétiens tués en 2018 dans le monde l’ont été au Nigeria (3.731 morts sur le sol nigérian, contre 2.000 en 2017). Dans ce pays, « les chrétiens font face à une double menace », le groupe djihadiste Boko Haram et les éleveurs peuls, notait déjà l’ONG protestante.

MASSACRE DES CHRÉTIENS : LE MONDE SE TAIT

« Dans le vacarme du monde, ces événements passent inaperçus », regrette Benoît de Blanpré, directeur de l’Aide à l’Église en détresse (AED) France. « Combien faudra-t-il de drames pour que l’Occident se réveille et prenne le sujet à bras le corps ? ».

Des appels, il y en a eu régulièrement, lancés par plusieurs évêques nigérians au fil des années. Mais ils sont restés sans réponse.

Début décembre, l’écrivain et philosophe Bernard-Henri Levy a médiatisé le sort de ces chrétiens en signant un reportage saisissant — et effrayant — dans les colonnes de Paris-Match sur les massacres de chrétiens nigérians .« Avant qu’on ait pu se barricader, ils sont dans les maisons, machettant, courant, incendiant, pillant et violant », raconte-t-il, assimilant les auteurs de ces actes à un Boko Haram décentralisé.
Cela « m’apparaît, de plus en plus clairement, comme un nettoyage ethnique et religieux méthodique », y affirme-t-il. « Cette situation, nous la dénonçons depuis dix ans », rappelle de son côté Benoît de Blanpré.

Depuis le début du conflit, plus de 36.000 personnes ont perdu la vie, dont environ la moitié étaient des civils. Ces derniers continuent de payer le prix ultime d’une crise dont ils ne sont pas responsables et dont ils ne veulent pas et quelque 30 millions de personnes ont été déplacés depuis le début de l’offensive djihadiste, en 2009.

Depuis que les violentes attaques du groupe islamiste Boko Haram ont commencé à déborder au-delà de la frontière nord-est du Nigeria en 2014, le Cameroun, le Tchad et le Niger ont été entraînés dans ce qui est devenu un conflit régional dévastateur.

Pour les Nations unies, « cette crise humanitaire demeure l’une des plus graves au monde, avec 7,1 millions de personnes ayant besoin d’une aide vitale et 1,8 million de personnes déracinées ».

DEMEURERA-T-ON LES BRAS CROISES ?

« Demeurera-t-on les bras croisés tandis que l’internationale islamiste, contenue en Asie, combattue en Europe, défaite en Syrie et en Irak, ouvre un nouveau front sur cette terre immense où ont coexisté, longtemps, les fils d’Abraham ? », lance Bernard-Henri Levy à la fin de son reportage.

« Après la chute de l’État islamique en Syrie et en Irak, nous avons observé des résurgences avec une menace islamiste qui se déplace aux Philippines et au Sahel », détaille encore Benoît de Blanpré. « Le Nigeria est plongé depuis une dizaine d’années dans une situation terrifiante : il y a bien sûr la dimension religieuse qui est centrale, mais il y a aussi des questions ethniques, politiques etc.

De nombreux islamistes associent les chrétiens à l’Occident donc, pour toucher les pays occidentaux, ils visent des chrétiens. D’ailleurs, sur place, plusieurs évêques évoquent les ravages en Afrique d’un islamisme importé, issu de guerres déclenchées au Moyen-Orient et non pas culturel.

Face à ces tragédies et ces jeux d’influence, nous devons nous interroger sur le manque de réaction de la part de la communauté internationale »

(site ALETEIA 31 12 2019)

Fête de la Sainte Famille – Année A – 29 décembre 2019 – Évangile de Matthieu 2, 13-23

ÉVANGILE DE MATTHIEU 2, 13-23

LA JOIE DE L’AMOUR FAMILIAL

Entre Noël et l’Épiphanie, au dernier dimanche de l’année civile, l’Eglise nous invite à méditer sur la famille que formait Joseph, Marie et Jésus. Que nous en dit l’évangile de ce jour ? Quelle aide en reçoivent nos propres familles ?

MENACE : UNE FAMILLE D’EMIGRES

Matthieu souligne le rôle essentiel de Joseph qui est un homme de prière et est très attentif à écouter les avertissements de Dieu. Celui-ci le prévient de la rage assassine d’Hérode à qui les mages ne sont pas venus préciser l’endroit où était cet enfant qu’ils estimaient le Messie d’Israël et donc Dieu presse Joseph de partir en toute hâte en Egypte. C’est ainsi que Jésus échappe au massacre des enfants déclenché par le roi fou.

Donc d’emblée Jésus et ses parents sont des émigrés, des pauvres qui ne comprennent pas pourquoi ils sont haïs à ce point et qui sont obligés de fuir en exil.

Un peu plus tard, Joseph apprend la mort d’Hérode et à nouveau, un songe divin l’invite à revenir dans son pays. Du coup s’accomplit la parole de Dieu proférée jadis par le prophète Osée: “ D’Egypte, j’ai appelé mon fils” (Os 11, 1). Par ces mots, Dieu rappelait à Israël que la libération, l’exode de leurs ancêtres hébreux esclaves en Egypte, était son oeuvre et qu’il voulait avec ces pauvres constituer son peuple bien-aimé, “son fils”.

Ainsi cet épisode démontre que Jésus accomplit, réalise maintenant l’histoire de ses ancêtres mais désormais le “fils de Dieu” n’est plus un peuple mais Quelqu’un, Jésus. Quelques années plus tard, lors de son baptême par Jean, il entendra la voix de son Père lui dire: “Celui-ci est mon Fils bien-aimé qu’il m’a plu de choisir” (Matt 3, 17). Sorti d’Egypte comme enfant, sorti de l’eau du Jourdain comme prophète, enfin sorti de la mort et du tombeau au Golgotha, Jésus est plus qu’un prophète mais bien le Fils qui “nous fait sortir”, libère l’humanité de la prison du péché afin d’en faire le peuple de Dieu leur Père.

Lors de leur investiture royale, les Pharaons étaient proclamés “fils de Dieu” par le grand-Prêtre mais ils finissaient comme momies sous les tonnes de pierre des pyramides, chefs d’oeuvre à la gloire de la mort. Jésus est le seul et authentique “Fils de Dieu”: devant lui la pierre a roulé, les tyrans disparaissent et lui, il vit pour toujours. Pour nous faire vivre comme des enfants de Dieu.

Toute la vérité et la profondeur de cette histoire se réalisent parce que Joseph, conscient de sa mission exceptionnelle, a décidé de demeurer à l’écoute de Dieu et de prendre les décisions adéquates. Au contraire, notre malheur à nous est que trop souvent nous nous croyons plus malins que Dieu: au lieu d’écouter ce qu’il nous souffle, nous décidons d’agir selon nos conceptions…et nous nous égarons terriblement.

MENACE MEME EN ISRAEL

Joseph pensait revenir en Judée mais il apprend que le nouveau souverain, Archelaüs, fils d’Hérode, a des moeurs aussi cruelles que son père. Derechef il se met dans la prière à l’écoute de Dieu qui lui conseille de remonter plus au nord, dans le district de Galilée et il vient habiter dans un petit village, Nazareth. Matthieu signale que cela ne se passe pas par hasard mais pour accomplir une ancienne prophétie: “Il sera appelé Nazôréen”, citation qui intrigue encore les exégètes car un habitant de Nazareth s’appelle Nazaréen.

CONCLUSION

Cet évangile inspire deux réflexions. Alors que le Messie apparaît dans la pauvreté, sans aucune ambition de conquête, sans aucun moyen de pression, il semble tout de suite dangereux aux yeux des Puissants. On dirait qu’ils pressentent que l’arrivée de Jésus est une menace pour eux et ils complotent contre sa vie. Plus tard ce ne sont pas les impies et les grands pécheurs qui lui en voudront mais les membres du Sanhédrin, Caïphe le Grand Prêtre et Ponce-Pilate, le préfet romain, qui décideront de son exécution.

Donc une Eglise qui ronronne doucement dans la liturgie bien huilée, qui bénit la situation établie, qui tolère les injustices et rejette à plus tard l’instauration du droit, qui est admirée et couverte de faveurs par certains qui veulent la faire taire, doit s’interroger très sérieusement sur sa fidélité.

Joseph, lui, nous apprend à demeurer vigilants, à rester fidèles à une prière d’écoute de la Parole de Dieu. Il faut assumer les difficultés, prendre des décisions qui dérangent. Garder en vie l’enfant et sa mère, Jésus et son Eglise, est un enjeu capital que beaucoup ont jugé accessoire parce qu’ils préféraient la réussite de leur carrière. Et la foi de multitudes s’est évanouie.

Prier ne se réduit pas à marmonner des formules mais oblige à dire à Dieu: “Seigneur: que dois-je faire ?”. Et à acquiescer comme Marie: “Que ta volonté s’accomplisse en moi”. Dès le premier instant, Joseph et Marie ont été terriblement bousculés mais, pris dans la tempête des événements, ils ont marché sur le chemin de Dieu. Car la foi est, au sens propre, bouleversante.

LA VIE FAMILIALE

Notre méditation du jour dépasse cet épisode afin de considérer tout le temps de l’enfance et de la jeunesse de Jésus, ce qu’on appelle les “années obscures”car les évangélistes ne nous en parlent guère. Quel rôle notamment y a rempli Joseph ?

Joseph est nommé l’artisan: il répare les maisons, les clôtures, les instruments de travail. Dur métier car les temps sont difficiles, les occupants romains pressurent le peuple de taxes et d’impôts. Des clients sont tellement misérables qu’ils reportent sans cesse leur payement. Compatissant, Joseph leur fait confiance au point de ne pas toujours pouvoir remettre à son épouse l’argent suffisant à la subsistance. Pas question de luxe et de dépenses inutiles. La nourriture est saine et frugale. Mais entre voisins, les pauvres savent s’entraider.

Tous les papas ont l’obligation d’apprendre un métier à leurs garçons, même les plus doués qui feront des études pour devenir des sages. Joseph apprend à son fils le maniement des outils, il l’emmène avec lui et lui transmet son savoir-faire. La Galilée verdoyante autour de son lac se couvre de nouvelles villes, avec écoles, théâtres, stades et aux carrefours on érige les statues des dieux. Bien des vestiges sont visibles aujourd’hui dans les musées. Ainsi Jésus découvre la vie du “monde moderne”, cette culture dont la Grèce est si fière et qui séduit bien des Juifs. Il importe de résister à la contagion. (pour nous aujourd’hui elle est écrasante).

Mais Joseph apprend surtout à son petit garçon la prière. Dès qu’il en est temps, en bon père juif, il a la charge de lui apprendre la prière fondamentale, ce qui est la profession de foi d’Israël: “Shema, Israël: Adonaï Elohenou Adonaï EHAD”: “Ecoute, Israël, le Seigneur nore Dieu est le Dieu UNIQUE”.

Le matin en sortant du lit, le soir avant de te coucher, tourné vers Jérusalem, tu couvriras tes yeux d’une main pour te recueillir pleinement et tu prononceras cette phrase avec tout l’élan de ton coeur. Ainsi depuis des siècles font encore les Juifs dans le monde entier. C’est la prière qui a permis à Israël de tenir dans la foi même devant les fours crématoires d’Auschwitz.

A table évidemment, en famille, on rend grâce à Dieu car les aliments viennent de sa Bonté. “Manger sans prier, c’est voler” disent les sages. Et toute le journée est parsemée de courtes bénédictions pour maintenir tout le quotidien dans le rapport à Dieu. “Béni sois-tu, Seigneur, toi qui …”.

Le shabbat, Joseph emmène son fils à la synagogue où toute la communauté villageoise se rassemble pour louer le Seigneur et écouter sa Parole qui est écrite dans les gros rouleaux de la Torah. Grand moment de grâce avec la prière des Psaumes et le chant du refrain alleluia. Toute cette journée sainte se déroule dans un climat spécial. L’arrêt de tout travail ne tourne pas en ennui et désoeuvrement. Au contraire on jouit d’une joie profonde: on retourne à l’office de la synagogue, on rend visite à un malade, on reçoit des amis avec lesquels on partage le gâteau aux figues que Marie a préparé la veille et qui faisait les délices du petit garçon.
Dès l’âge requis, Jésus se rend à l’école de la synagogue où le rabbin apprend la lecture, l’écriture puis toute l’histoire d’Israël. Assoiffé de vérité, il boit ces Paroles, les apprend par coeur, questionne le maître quand il rencontre un passage obscur. De retour à la maison, il discute avec ses parents de ses découvertes.

CONCLUSION

Le temps a complètement changé, nos conditions de vie sont tout autres. Mais l’essentiel alors comme pour nous maintenant demeure: la vie ensemble dans le train-train des jours, le dialogue, l’école quotidienne de l’amour. Réfléchir à ces années de l’enfance de Jésus, à la vie ordinaire imprégnée de prière est important en ce temps où la famille, attaquée de partout, révèle sa fragilité. Qu’est-ce que l’attitude de Joseph apprend aux pères d’aujourd’hui ?

Frère Raphaël Devillers, dominicain

PRIÈRE DU PAPE FRANCOIS

(Fin de l’Exhortation “La joie de l’amour”)

« Jésus, Marie et Joseph,
en vous nous contemplons la splendeur de l’amour véritable,
à vous nous nous adressons avec confiance.

Sainte Famille de Nazareth,
fais aussi de nos familles
des lieux de communion et des cénacles de prière,
des écoles authentiques de l’Évangile
et des petites Églises domestiques.

Sainte Famille de Nazareth,
que jamais plus dans les familles
on fasse l’expérience de la violence, de la fermeture et de la division :
que celui qui a été blessé ou scandalisé
soit bientôt consolé et guéri.

Sainte Famille de Nazareth,
Fais prendre conscience à tous
du caractère sacré et inviolable de la famille,
de sa beauté dans le projet de Dieu.

Jésus, Marie et Joseph,
écoutez-nous, exaucez notre prière »


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Fruit de deux années d’enquêtes dans tous les pays et de deux Synodes.

Un livre épais qui aborde tous les problèmes: rapports du couple, divorcés remariés, personnes homosexuelles, jeunes, préparation au mariage, etc…

A lire et méditer par tous.

(éd. Fidélité – 6, 90 euros)

FETE DE NOËL – ANNEE A – 25 DECEMBRE 2019 – EVANGILE DE LUC 2

ÉVANGILE DE MATTHIEU 1, 18-24

NOËL : FÉERIE OU RÉALITÉ ?

Le dictionnaire définit le mot NOËL: “du latin nativitas = naissance. Fête que les chrétiens célèbrent le 25 décembre, en commémoration de la naissance du Christ”.

Or ce n’est absolument plus cela que voyons aujourd’hui. Intituler un “village de Noël”, placarder sur les vitrines d’énormes affiches clamant “Joyeux Noël”, c’est un mensonge. On ne célèbre plus la naissance d’un enfant pauvre mais l’arrivée triomphale d’un vieux bon papa jovial disposé à nous combler de cadeaux (si nous avons de l’argent). On n’accueille plus celui qui est la Lumière du monde: on tisse des guirlandes sur des sapins. Nul besoin d’un Sauveur puisque l’on possède tous les moyens de faire la fête, de s’offrir un banquet avant de ruisseler de bonheur dans une croisière ou sur les pentes enneigées.

Donc cette chaîne internationale d’ameublement est logique lorsqu’elle supprime le mot Noël et proclame “Fête de l’Hiver” (comme Pâques sera remplacé par “Fête du Printemps”). Et tout autant ceux qui vous écrivent: “Joyeuses fêtes de fin d’année”.

Mais au fait n’est-ce pas dans l’ignorance de tous que l’événement de Noël s’est passé?

Ne nous plaignons pas et ne regrettons pas un temps où peu à peu la foi chrétienne se dissolvait dans le folklore. La crise actuelle offre une magnifique occasion d’une purification pour que l’on voie bien la différence entre la fête païenne du soleil et la célébration chrétienne du Sauveur du monde.

Comme toujours, c’est l’Évangile qui nous conduira dans la vérité.

COUPS DE PROJECTEUR SUR LES ACTEURS DE L’EVÉNEMENT

“César Auguste lança un décret pour recenser le monde”.

Les Puissants jouissent de comptabiliser leurs sujets lesquels au fond ne sont pour eux que des objets à manipuler, à mobiliser pour la guerre et à pressurer d‘impôts. Joseph et Marie n’ont aucun droit de refuser: qu’ils partent comme tant d’autres. Ainsi Jésus sera un enfant du voyage. Mais ainsi il naîtra dans le village de son prestigieux ancêtre, le roi David. L’empereur impose mais Dieu dispose. Il y a une logique de Dieu dans le fatras des circonstances.

“Marie accoucha, elle emmaillota et déposa le nouveau-né dans une mangeoire”.

La crèche n’est pas une maison ni une grotte mais une mangeoire fixée au mur pour les bêtes. Le fait devait être assez courant pour les pauvres et le restera encore des siècles pour les misérables qui profitaient de la chaleur des animaux. Que nous voilà loin du barnum de nos sociétés. Et quelle stupeur ! Le fils de Dieu naît comme l’un de nous, celui qui va changer le monde est endormi sur la paille. Les médias qui se croient au courant de tout ratent souvent l’essentiel.

“ L’Ange dit aux bergers: “Je vous annonce une Bonne Nouvelle, qui sera grande joie pour le peuple. Aujourd’hui vous est né le Sauveur, le Christ Seigneur.
Voici le signe: vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une crèche”

Il est amusant d’imaginer les hérauts de César, montés sur des chevaux fringants, fonçant à travers Rome et les campagnes pour claironner “la bonne nouvelle”: un petit prince est né au palais, on va procéder à une immense distribution gratuite de pains et de vins.

Occasion pour nous de nous interroger: que recevons-nous comme “bonne nouvelle” ? Une augmentation de salaire ? Un voyage ? Un n°gagnant au loto ? le mariage du prince ? un grand concert ?

Noël nous remplit-il d’une grande joie ? Avons-nous le désir d’annoncer la libération par le seul et authentique Sauveur ?

Les Anges chantaient les louanges de Dieu:
“Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur terre pour les hommes qu’il aime”.

Je veux la paix, clame le dictateur. Nous allons signer un traité de paix, disent les diplomates. Ah si on pouvait avoir la paix, soupirons-nous. Et ça ne marche jamais ou la paix ne tient qu’un temps. Pourquoi ? Parce qu’on rêve de paix entre hommes sans d’abord chanter la Gloire de Dieu. On veut l’effet sans la cause. La concorde sans la foi.

Des bergers veillaient la nuit pour garder leurs troupeaux. “Allons voir” disent-ils.
Et à Bethléem ils découvrent Marie, Joseph et le nouveau-né sur la paille.

Ils ne ressemblent certainement à de mignons angelots, ces pouilleux de basse classe. Mais ils nous apprennent les conditions pour découvrir Jésus.

D’abord demeurer vigilants, ne pas s’assoupir au milieu des ténèbres du monde. Rester attentifs aux menaces de la mort qui rôde. Prêter une oreille bienveillante quand certains annoncent la Bonne Nouvelle de Jésus sans d’emblée ricaner et tourner en dérision ces vieilleries religieuses. Enfin se déplacer, se mettre en recherche, être curieux de cette Eglise qui semble proclamer une chose impossible.

Hélas, prisonniers de l’opinion courante, chloroformés par la publicité, fascinés par le torrent des images, des multitudes resteront prisonnières de leurs chaînes. Partisans enthousiastes du siècle des Lumières où Dieu est mort, ils fêteront la fin de la religion avant de s’effondrer devant Auschwitz où l’homme est mort. Chantres des droits de l’homme, ils s’écorcheront les ongles sur les murailles des injustices invaincues.

“Marie retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur”.

Phrase essentielle qui pointe une attitude essentielle de notre foi (d’ailleurs Luc la répétera une seconde fois lors de l’épisode de la fugue du garçon à 12 ans).

Ce que nous vivons avec Dieu n’est pas toujours compréhensible sur le champ. Il nous arrive tel incident et il nous tombe des tuiles, nous faisons des efforts de prière et nous tombons malades ou un deuil nous frappe. Nous butons sur des paroles de Jésus ou, surtout, de Paul, et nous ne comprenons pas. Que nous souffle donc le Seigneur ? Où veut-il nous guider ?

Beaucoup, énervés par ces problèmes insolubles, bousculés dans leurs certitudes, renoncent à comprendre: “C’est un mystère”. Or un mystère n’est pas une énigme à résoudre avec la raison mais un gouffre de lumière où il faut accepter d’entrer avec la volonté de comprendre quand Dieu le voudra.

Marie est emportée par un flux d’événements extraordinaires et Dieu ne les lui explique pas au fur et à mesure. Mais elle garde le souvenir, elle médite le rapport entre ce qu’elle vit et ce que lui ont appris les Écritures et ce que son Fils lui dira plus tard. Le petit emmailloté sera le cadavre de son fils enserré dans le suaire. Jésus, endormi dans une mangeoire, sera en effet la nourriture des croyants. D’ailleurs Bethlehem en hébreu ne signifie-t-il pas “maison du pain” ? Les bergers dépenaillés n’annoncent-ils pas les foules des pauvres rejetés par la société de consommation et qui se presseront pour écouter Jésus ?

Et Joseph ?

A nouveau il s’était endormi dans son coin et il faisait un rêve. Qu’il chuchota à son épouse: “ J’ai vu l’avenir et des enfants chrétiens qui chantaient: “Petit papa Noël, quand tu descendras du ciel, avec des jouets par milliers, n’oublie pas mes petits souliers…”. Et il écrasa une larme au coin de l’oeil: “Ils sont incurables ! Il nous faut un Sauveur du ciel !”.

Et les jeunes bergers repartirent en chantant la gloire de Dieu.

Non Noël n’est pas une féerie, un moment magique de gastronomie, une guirlande que l’on range jusqu’à l’année suivante, la “fête de fin d’année” qui nous prépare à entrer dans la période des soldes – car le paradis moderne n’est-il pas d’acheter et consommer?

Noël ne nous a pas donné des choses mais quelqu’un. Le seul et incomparable cadeau de Dieu: son Fils. Tandis que les spots et les guirlandes s’éteignent, et que nous rapportons au magasin les cadeaux dont nous n’avons que faire, un nom brille dans nos cœurs: JESUS. EMMANUEL. Dieu pour toujours avec nous.

Nul besoin de voler vers Bethléem pour voir si c’est bien l’endroit où …

Jésus naît dans le fond de ton cœur quand les plaies de tes souffrances s’ouvrent à sa présence.

Quand pécheur invétéré, tu reviens vers lui qui t’ouvre les bras pour te pardonner.

Quand, avec Marie, Joseph et la multitude, tu te rends le dimanche à l’église: alors tu tends la main telle une crèche et enfin tu comprends ce qu’est l’authentique communauté de consommation, pour la Vie éternelle.

Frère Raphaël Devillers, dominicain

LE PAPE FRANCOIS AVEC LES JEUNES : LE SENS DE NOËL

Le Saint-Père a reçu, lundi 16 décembre 2019, 64 enfants et jeunes de l’Action catholique italienne. Il est revenu sur le sens de la Nativité et les a appelés à apprendre de la Vierge Marie la signification de Noël.

A la soixantaine d’enfants et d’adolescents de l’Action catholique italienne réunis dans la salle du consistoire au Vatican, le Pape François a rappelé que ce programme leur traçait un chemin pour les aider à prendre conscience de leur vocation de disciple-missionnaire. Le Saint-Père a tenu a remercier les jeunes pour leur prière, «et je les renouvelle du fond du cœur avec l’espérance que le Sauveur rendra pleine la joie que je vois aujourd’hui sur vos visages», a-t-il déclaré.

Angélus: l’Avent, un temps de grâce pour «purifier notre foi»

Il sera intéressant de récolter les fruits dans le sillage du Synode sur les jeunes, la foi et le discernement vocationnel qui a eu lieu en octobre 2018, a continué l’évêque de Rome, invitant les jeunes à partager leur observations et propositions.

Puis, il leur a laissé un «devoir» à la maison : le jour de Noël, «unissez-vous en prière et, avec la même stupéfaction que les bergers, regardez l’Enfant Jésus, venu dans le monde pour apporter l’amour de Dieu, qui fait toutes choses nouvelles».

Jésus, avec sa naissance, est devenu le pont entre Dieu et les hommes, réconcilié la terre et le ciel, recomposé tout le genre humain en unité. Ainsi, a enchaîné le Saint-Père, Jésus demande aujourd’hui aux jeunes de construire des ponts, même petits:

«Qu’est ce qui est mieux ? Construire des ponts ou des murs ?», a demandé François aux enfants, qui ont répondu en chœur, «des ponts!», «Vous réalisez déjà qu’il est nécessaire de construire des ponts», a constaté François.

Puis le Pape a demandé à la Vierge Marie d’accompagner ces jeunes italiens de l’Action catholique, et que ces derniers apprennent avec la mère de Dieu la signification de Noël. «Elle et Saint Joseph peuvent véritablement vous enseigner comment s’accueille Jésus, comment l’adorer et le suivre jour après jour». «Je vous bénis, vous et tous les garçons et les filles de l’Action Catholique des Jeunes. Et vous, s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi», a conclu le Saint-Père.

4ème dimanche de l’Avent – Année A – 15 décembre 2019 – Évangile de Matthieu 11, 2-11

ÉVANGILE DE MATTHIEU 1, 18-24

NE CRAINS PAS DE PRENDRE MARIE

Marc, le premier évangéliste, commence d’emblée son récit avec l’apparition de Jean-Baptiste et Jésus, l’artisan de Nazareth qui se présente avec la foule. Dans les années 80, Matthieu évoque la naissance de Jésus en portant l’intérêt sur la figure de Joseph. Luc peu après le suivra, en éclairant surtout le personnage de Marie avec les scènes célèbres de l’Annonciation et de la creche de Bethléem.

LIVRE DE LA GENÈSE DE JESUS CHRIST, FILS DE DAVID, FILS D’ABRAHAM

Tel est le titre réel que Matthieu donne à son livre: l’apparition de Jésus sur terre n’est pas un événement comme les autres. Il s’insère bien dans l’histoire, dans un arbre généalogique, mais il marque une “création”, la genèse, le renouvellement du monde.

Les sciences améliorent la situation de l’homme, la médecine cherche à le garder en bonne santé, la culture et les arts lui ouvrent la connaissance universelle, la religion lui offre des croyances et des rites, la morale lui propose un code de conduite, la politique aménage les conditions du vivre ensemble, l’amour l’épanouit. Mais Jésus Christ le recrée et donc donne sens à tout le reste.

Donc lire le livret de Matthieu, croire à son personnage, décider de lui faire confiance, c’est l’accepter comme Evangile, comme une Bonne Nouvelle qui recrée le lecteur.

Il faut donc corriger le début de la lecture liturgique et bien traduire ce que Matthieu répète: “Et voici quelle fut la genèse de Jésus Christ”. Elle se passa de façon toute simple et énigmatique.

JOSEPH LE JUSTE FOUDROYÉ

Alors qu’Israël était intégré dans l’immense Empire romain, on avait célébré avec joie, dans le petit village de Nazareth en Galilée, les noces de deux jeunes gens. Joseph est, dit-on, un très lointain descendant de la famille royale de David et exerce le métier de charpentier. De Marie, on ne dit rien. Selon les coutumes du temps, elle doit avoir environ 14-15 ans, âge où l’on marie les filles. De leurs apparences, leurs caractères, rien n’est dit.

Après la fête, la mariée est demeurée dans la maison de ses parents tandis que le jeune époux a charge pendant plusieurs mois d’acquérir et d’aménager la future maison du couple.
C’est alors qu’éclate l’inouï, l’impensable, le scandale.

“Marie, la mère de Jésus, avait été accordée en mariage à Joseph. Or, avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit-Saint ! Joseph, son époux, qui était un homme juste, ne voulait pas la dénoncer publiquement: il décida de la répudier en secret”.

Le mariage a été public. S’il y a eu faute, la répudiation est obligatoire et ne peut être que publique. Mais seule Marie sait et c’est elle qui doit expliquer à son époux ce qui s’est passé. Là-dessus, le texte garde le secret mais, au lieu de dénoncer la coupable et de la livrer au terrible châtiment de l’adultère, Joseph accepte la confidence de Marie, dit Matthieu, parce qu’il est “juste”.

Dans la Bible, un juste n’est pas d’abord un homme équitable, intègre sur les partages et le droit, mais un homme “ajusté” à la volonté de Dieu, un homme qui en toute droiture cherche à connaître la volonté de Dieu et décide de s’y soumettre quoi qu’il lui en coûte. Joseph reçoit, sidéré, les confidences de Marie et il est absolument certain qu’elle ne lui ment pas. Il ne peut l’accuser de faute. Il ne lui reste plus qu’à s’effacer.

On ne voit pas bien ce que voudrait dire ”répudier en secret” sinon que, meurtri et déchiré dans son amour, Joseph prendrait la décision de fuir au loin. Mais c’est alors que Dieu intervient et l’homme juste va obéir.

L’Ange du Seigneur lui apparut en songe: “Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse. L’enfant engendré en elle vient de l’Esprit-Saint, elle mettra au monde un fils auquel tu donneras le nom de Jésus (qui signifie “Dieu sauve”) car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés”.

Dieu demande à Joseph d’être vraiment le père de cet enfant, d’assumer son rôle de père qui donne le nom à son fils, donc qui l’introduit de ce fait dans la descendance de David, et qui ensuite protège le foyer et subvient à tous les besoins de la petite famille.

AFIN QUE S’ACCOMPLIT LA PROPHÉTIE D’ISAÏE

Dans leur mission auprès des Juifs, les premiers chrétiens devaient absolument prouver que Jésus était le Messie et qu’il descendait de la famille royale de David.

C’est pourquoi Matthieu termine son récit en affirmant que “Tout cela arriva pour que s’accomplit la parole du Seigneur prononcée par le prophète Isaïe”. Et il rappelle un épisode célèbre (lire Isaïe 7 – 1ère lecture)

Au 8ème siècle avant notre ère, les rois de Damas et de Samarie décidèrent d’attaquer la Judée qui refusait de prendre part à leur coalition antiassyrienne et de remplacer le roi descendant de David par leur candidat.

Le jeune roi Akab qui venait à peine de monter sur le trône de Jérusalem paniquait avec toute la ville devant la menace qui s’approchait.

Or tandis qu’il faisait une tournée de surveillance des nouvelles fortifications, Isaïe, accompagné de son fils, vint à sa rencontre et lui affirma qu’il pouvait chasser toute peur et dormir tranquille. Il l’assura : “ La jeune femme va enfanter et avant que le garçon ait atteint l’âge de raison, ces 2 armées ennemies seront dispersées. Si vous ne croyez pas, vous ne subsisterez pas”.

Le roi et la ville restaient sceptiques mais en effet la prophétie se réalisa: les ennemis furent en déroute, la reine eut un garçon et la dynastie davidique se prolongea.

De ce fait miraculeux, on fit un triomphe au don de prophétie d’Isaïe au point que la mémoire de cet événement devint la certitude d’un autre salut qui serait apporté. Plus tard une autre jeune femme sera enceinte, donnera un rejeton de David qui apportera le salut messianique.

Matthieu comprend ainsi que cette antique prophétie vient en effet de s’accomplir avec Jésus.

“La jeune femme”, Marie, a enfanté un petit garçon; il peut légitimement être appelé IESHOUAH- JESUS (équivalent de Josué) qui signifie “sauveur”. Mais le verbe est à prendre au sens le plus plénier du terme.

Jésus sauve de l’attaque la plus pernicieuse, celle du péché, laquelle paraît toujours avoir la force de nous submerger. Il ne sauve pas par l’emploi des armes mais par lui-même, par la miséricorde, en aimant jusqu’à donner sa vie sur la croix. Donc son salut n’est pas réservé à un peuple, à une circonstance, mais s’étend au monde entier, à l’univers.

En outre on pourra aussi le nommer EMMANUEL, ce qui en hébreu, veut dire “Dieu avec nous” car il ressuscitera et promettra de demeurer avec nous. Et c’est bien ainsi que Matthieu clôture son évangile:

Le Ressuscité apparaît à ses disciples et leur dit: “Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc: parmi toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, et leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, JE SUIS AVEC VOUS (EMMANUEL) tous les jours jusqu’à la fin des temps” (28, 18)

Le fils de Marie est bien JESUS … LE SAUVEUR … EMMANUEL . “Si vous ne croyez pas, vous ne subsisterez pas”: l’avertissement d’Isaïe reste formel.

CONCLUSION

La Bible n’est pas un recueil d’histoires anciennes: elle est notre histoire, toujours en train de s’accomplir.  Ainsi ne sommes-nous pas devant l’Eglise comme Joseph devant Marie ?  Quelle est cette organisation qui prétend nous apporter le Sauveur du monde ? D’où tient-elle cette certitude ? Ne veut-elle pas nous tromper ? D’ailleurs cette Eglise n’a aucun droit de se dire intacte, intègre.

Nous, l’humanité, nous menons une guerre terrible contre le mal qui corrode notre santé, qui déclenche les forces d’envie, de jalousie, de cupidité, d’orgueil qui nous jettent les uns contre les autres dans des conflits terrifiants, et même transforment l’amour en haine. Nos échecs sont patents mais quand même nous progressons en sciences et en droits de l’homme. Pourquoi aurions-nous besoin d’un sauveur ?

“Joseph, ne crains pas de prendre Marie chez toi: elle te donnera Jésus”, l’enfant que tu ne peux faire mais que tu as à accueillir.

Les mets de choix et les vins exquis que nous allons consommer aux banquets des prochains jours de fête seront toujours impuissants à changer notre cœur. Et nos vœux si généreux soient-ils ne seront jamais que des souhaits impuissants.

Comme Joseph, sois juste à l’écoute de la Bonne Nouvelle, reçois la pauvre Hostie que te présente l’Eglise-Marie. Alors Noël ne sera plus le nom d’un père mythique mais l’avènement du sauveur de ta pauvre vie.

Frère Raphaël Devillers, dominicain

PAPE FRANCOIS : CONVERTIR L’IDÉE QUE NOUS AVONS DE DIEU

Angélus 15.12.2019

… Le salut enveloppe l’homme tout entier et le régénère. Mais cette nouvelle naissance, avec la joie qui l’accompagne, suppose toujours une mort à nous-mêmes et au péché qui est en nous.

D’où l’appel à la conversion, qui est la base de la prédication à la fois du Baptiste et de Jésus; en particulier, il s’agit de convertir l’idée que nous avons de Dieu.

Et le temps de l’Avent nous encourage à le faire précisément par la question que Jean-Baptiste pose à Jésus: « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre? » (Mt 11, 3). Nous pensons: pendant toute sa vie, Jean a attendu le Messie; son style de vie, son propre corps est façonné par cette attente. C’est aussi pourquoi Jésus le loue par ces paroles: nul n’est plus grand que lui parmi ceux qui sont nés d’une femme (cf. Mt11,11).

Et pourtant, lui aussi a dû se convertir à Jésus. Comme Jean, nous aussi nous sommes appelés à reconnaître le visage que Dieu a choisi d’assumer en Jésus-Christ, humble et miséricordieux.

L’Avent est un temps de grâce. Il nous dit qu’il ne suffit pas de croire en Dieu: il faut purifier chaque jour notre foi. Il s’agit de se préparer à accueillir non pas un personnage de conte de fées, mais le Dieu qui nous appelle, nous implique et devant qui un choix s’impose.

L’enfant qui gît dans la crèche a le visage de nos frères et sœurs les plus nécessiteux, des pauvres qui « sont les privilégiés de ce mystère et, souvent, ceux qui sont le plus capables de reconnaître la présence de Dieu au milieu de nous » (Lettre apostolique Admirabile signum, 6).

Que la Vierge Marie nous aide, pour qu’ à l’approche de Noël, nous ne nous laissions pas distraire par les choses extérieures, mais que nous faisions de la place dans notre cœur à Celui qui est déjà venu et veut revenir pour guérir nos maladies et nous donner sa joie.

3ème dimanche de l’Avent – Année A – 15 décembre 2019 – Évangile de Matthieu 11, 2-11

ÉVANGILE DE MATTHIEU 11, 2-11

ATTENDRE UN AUTRE SAUVEUR QUE JESUS ?

Combien d’enfants baptisés, portés par leur milieu, sont devenus des jeunes convaincus, membres enthousiastes de mouvements de jeunesse, engagés dans la pastorale paroissiale, assidus aux retraites et aux pèlerinages. Jusqu’à ce que la maturité, les études, les rencontres de penseurs incroyants, la lourdeur des institutions corrodent le bloc de leurs certitudes traditionnelles. Les questions les taraudent, souvent sans réponse: Le message chrétien est-il crédible ? Peut-on faire confiance à des Ecritures qui posent tellement d’interrogations ? Après 20 siècles et au coeur de la modernité, peut-on encore croire que Jésus est le Sauveur ? L’Eglise n’est-elle pas complètement déphasée ?

C’est ainsi que, en quelques dizaines d’années, dans tous les pays occidentaux, des millions de chrétiens sont devenus agnostiques sinon incroyants. La musique enjôleuse de la société élimine en eux tout souci d’une transcendance et les persuade que l’achat des choses offre un plaisir qui évacue le désir énigmatique du rachat des âmes.

C’est pour nous mettre en garde contre ces désillusions, pour nous ancrer dans une espérance qui subsiste même dans le mal, même en prison, que la liturgie nous donne l’exemple de Jean-Baptiste. Autrement dit: que signifie vraiment attendre la venue du Sauveur ?

Dimanche passé, nous écoutions ce jeune prophète qui, seul et voué à une pauvreté totale, haranguait les foules pour leur annoncer la Bonne Nouvelle: “Moi je ne peux que vous exhorter à changer de vie mais il va venir, celui qui est infiniment plus fort que moi: il vous introduira dans le Royaume de Dieu, il vous plongera dans la puissance de l’Esprit de Dieu. Dépêchez-vous de vous préparer car:

“Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres….Il tient la pelle à vanner dans sa main, il va nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera le grain dans son grenier. Quant à la paille, il la brûlera dans un feu qui ne s’éteint pas”.

UN MESSIE QUI NE CORRESPOND PAS A L’ATTENTE

L’évangile raconte ensuite qu’un certain Jésus de Nazareth vient se faire baptiser par Jean et, en secret, il subit le choc d’un appel de son Père: c’est lui l’anonyme annoncé par Jean. Il s’enfonce un temps dans la solitude et il décide d’accomplir sa mission en rejetant toutes les tentations de puissance.
Apprenant que Jean vient d’être arrêté sur ordre du roi, Jésus remonte dans la Galilée du nord et en effet il exerce sa mission. Mais de quelle façon ! Matthieu la résume comme ceci:

Jésus parcourait toute la Galilée, enseignant dans les synagogues, proclamant la Bonne Nouvelle du Royaume et guérissant toute maladie et toute infirmité” (4, 23)

Jean-Baptiste annonçait la fulgurance imminente de la moisson finale: Jésus se présente comme le semeur.
Jean faisait trembler en évoquant la cognée prête à tout abattre: Jésus parle de planter un minuscule grain de sénevé.
Jean évoquait l’extermination finale par le feu: Jésus avec douceur allume dans les coeurs la petite flamme des Béatitudes.

Quel contraste violent entre l’annonce du prophète et le comportement de Jésus !

L’EVANGILE DU JOUR : L’ANGOISSE DE JEAN.

Dans sa prison, Jean pressent que le moment de son exécution approche. Angoissé, il tourne et retourne la question: “Pourquoi Jésus que j’ai annoncé comme bien plus fort que moi n’intervient-il pas ? Pourquoi me laisse-t-il aller à la mort, moi qui ai été son maître ?”.

Et à l’occasion de la visite de quelques-uns de ses disciples, il les envoie d’urgence près de Jésus pour lui poser l’interrogation cruciale à laquelle Jésus répond de manière déconcertante:

Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre? …

Jésus leur répondit: “Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez: les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres … Heureux celui qui ne sera pas scandalisé par moi”.

Donc Jésus assume bien la fonction de Messie Sauveur prévu par Jean mais il la réalise d’une manière très surprenante. Humilié depuis des siècles par des puissances étrangères, envahi par le paganisme, le peuple élu, Israël, était porté à imaginer la venue d’un Sauveur tout-puissant, déchaînant la colère divine contre ses ennemis, écrasant les impies et assurant le triomphe des fidèles dans un pays libre.

Or Jésus accomplit un messianisme discret. il montre son pouvoir sur le mal mais seulement par quelques rares signes de guérison. Il est réticent devant toute manifestation de puissance, il ne cherche jamais à s’imposer, il refuse absolument tout mouvement insurrectionnel contre l’armée romaine.

Jésus ne croit pas à la transformation politique, à l’affrontement par les armes, à l’usage de la violence. Mener un coup de force pour libérer le Baptiste n’amènerait qu’un bain de sang.

Son oeuvre fondamentale n’est ni guerrière ni médicinale. Il parle. Son arme, c’est la parole c’est-à-dire un moyen qui respecte la liberté de conscience et qui appelle tout auditeur à s’engager soi-même.

Jésus ne crée pas un monde de paix, de justice, de bonne santé: il promet le bonheur à ceux et celles qui le croient sur parole et qui s’engagent, derrière lui et comme lui, à transformer le monde.

“Heureux les pauvres en esprit qui écrasent leur orgueil. Heureux les doux qui ne sont plus obsédés par l’enrichissement. Heureux ceux qui renoncent à se venger et qui ont la force de pardonner. Heureux ceux qui construisent la paix avec la patience d’humbles artisans. Heureux même ceux qui souffrent à cause de moi”.

“La Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres”. Elle n’est pas le paradis, le cadeau rêvé par les enfants irresponsables mais son commencement compris par les cœurs humbles et qui se veulent co-responsables.

Le Royaume est inauguré par Jésus mais c’est à nous à accepter d’y entrer et de prendre part à son expansion universelle.

“Heureux celui qui ne sera pas scandalisé”. Car ce Royaume prêché à de pauvres villages de Galilée et qui se présente sans éclat sera moqué, ridiculisé. Ce curieux “Messie” sera pour beaucoup incroyable. Surtout lorsqu’il sera arrêté, dénudé, flagellé, condamné et mis en croix. Mais alors, il sera donné à ses disciples ébahis de percevoir l’apparition furtive de la gloire du Royaume en ce même Jésus ressuscité. Car c’est l’amour qui s’authentifie par le don de soi jusqu’à la mort qui fait renaître l’homme dans la lumière de la Vérité et dans l’éclat de la Vie éternelle.

Il faut sortir de l’affrontement des forces. En ne guérissant que quelques corps, Jésus signifie qu’il vient surtout guérir les cœurs. C’est de la prison de la violence et du péché qu’il vient nous libérer. Il appelle tout homme à devenir enfant de Dieu.

GRANDEUR DU BAPTISTE

L’évangile se termine par le grand éloge de Jean. Il n’était pas un roseau qui plie au gré des opinions ni un prédicateur cupide. D’un courage intrépide, d’un dénuement total, il a reçu la mission unique d’être non seulement un grand prophète mais “le messager que Dieu a envoyé pour préparer les chemins du Messie”. En ce sens il est le plus grand des hommes.

Mais il n’a pas soupçonné le tournant radical que le messie Jésus allait apporter. Avec Jean la page de l’histoire se tourne et la nouvelle, l’ultime page va s’ouvrir avec Jésus. Relisez les lettres de Paul pour redécouvrir l’émerveillement de l’apôtre et des convertis de Salonique ou de Corinthe qui fêtaient la joie de vivre la grâce que la foi en Jésus leur apportait. “Vous n’êtes plus sous la Loi mais sous la grâce”. Pour Jésus on supportait coups, injures, prisons, mort.

CONCLUSION

Jean ne comprenait pas pourquoi Jésus ne venait pas le libérer de sa prison. A sa suite, et aujourd’hui encore, des chrétiens sont désemparés par les malheurs qui leur surviennent et la non intervention de celui que l’Eglise appelle “le Sauveur”.

L’histoire récente raconte les efforts gigantesques de la modernité pour ôter toute valeur à l’Evangile, pour prouver l’inanité du salut chrétien et présenter des héros et des puissances capables de réaliser enfin ce que l’Eglise a échoué à faire depuis 20 siècles. D’autre part une religion assure que Jésus n’a constitué qu’une étape et qu’il faut croire désormais à un autre qui apporte le salut définitif.

Des multitudes sont ébranlées par ces réflexions et s’interrogent: : “Jésus est-il le Messie que Dieu annonçait ou ne faut-il pas en attendre un autre ?”. Certains ajoutent même: “Il ne faut plus croire à ces mythes mais lutter avec courage et détermination”.
Jésus nous enjoint comme aux délégués du Baptiste: “ Allez rapporter ce que vous voyez et entendez”. Sommes-nous capables de raconter les signes qui témoignent de l’efficacité de la foi, de montrer pourquoi nous restons convaincus de la présence active et unique du Sauveur Ressuscité ?

Si nous restons bouche bée, les brebis éloignées ne reviendront pas.

Frère Raphaël Devillers, dominicain

“RAPPORTEZ CE QUE VOUS VOYEZ ET ENTENDEZ”

Evangéliser, ce n’est donc pas seulement annoncer, expliquer, défendre, exhorter, démontrer mais RACONTER.

Suivons-nous la vie de l’Eglise ? Gardons-nous seulement l’image médiatique d’une Eglise nid de scandales ?
Nous sentons-nous participants d’une mission universelle ?
Savons-nous dire notre fierté d’une Eglise qui apporte Jésus Sauveur ?
Le manque d’informations de la grosse majorité des catholiques est abyssale !
Et la médiocrité de l’aide à nos frères misérables catastrophique.


MONDE : Statistiques fin 2017: 7, 4 milliards d’humains dont 1, 3 milliard sont catholiques.

PAKISTAN: 500.000 personnes ont reçu leur 1ère communion en 2018

PERSECUTIONS : Les chrétiens sont le groupe religieux le plus persécuté au monde. C’est en Asie du sud-est que la situation s’est le plus dégradée à cause de l’extrémisme musulman, le nationalisme agressif et les régimes autoritaires.

L’attentat islamiste du 27.1.19 aux Philippines a fait 20 morts et plus de 100 blessés; celui du dimanche de Pâques au Sri Lanka a tué 258 personnes et blessé plus de 500 autres.

PAKISTAN: attentat des talibans contre l’église de Queta: 9 morts; 50 blessés.

AFRIQUE DJIHADISTE: La violence bat son plein, faisant aussi des victimes chez les musulmans.

BURKINA FASO (anciennement Haute-Volta): traverse une crise sans précédent avec une extension du terrorisme.

NIGERIA : 3731 chrétiens tués en 2018: “Il existe clairement un ordre du jour pour islamiser toutes les zones majoritairement chrétiennes” (Mgr Anagbe, évêque).

REPUBLIQUE CENTRE AFRIQUE: 112 personnes, dont 2 prêtres et un pasteur, massacrées en novembre 2018

MAROC : Des mesures de répression de l’Etat contre les chrétiens ont été prises.

ERYTHREE : le gouvernement a confisqué et fermé les 21 derniers hôpitaux et centres de santé catholiques qui prenaient en charge au moins 170.000 personnes chaque année.

IRAK: Les chrétiens étaient 1, 5 million en 2003: ils sont maintenant moins de 150.000

Revue: “L’EGISE DANS LE MONDE” n°196 (janvier 2020)

Magazine d’actualité publié par A.E.D. (Aide à l’Eglise en détresse) Dons et abonnement : www.aed-france.org

2ème dimanche de l’Avent – Année A – 8 décembre 2019 – Évangile de Matthieu 3, 1-12

ÉVANGILE DE MATTHIEU 3, 1-12

CONVERTISSEZ-VOUS : IL VIENT

Décembre: mois de l’effervescence et de l’agitation. On court, on court, on court. Profiter des soldes du “black friday”, préparer les jouets et les bonbons que saint Nicolas apportera, préparer le sapin avec les guirlandes, préparer des cadeaux originaux, préparer le banquet de Noël, puis (pour certains) préparer les valises et les équipements de ski, puis, rebelote, préparer le banquet du réveillon du Nouvel-An. Ouf ! En conclusion il ne vous reste plus qu’à vous préparer une tisane contre les maux de tête, et préparer un régime pour perdre les calories accumulées en un mois.

“PRÉPAREZ”: c’est aussi le grand impératif que l’Eglise nous lance par la bouche de Jean-Baptiste. Non pour la fin de l’année mais pour l’achèvement du monde. Non pour une rencontre familiale et amicale ponctuelle mais pour la communion universelle. Non pour agiter des choses mais pour renouveler les cœurs.

Le prophète proclame la venue d’un événement extraordinaire qui va changer l’histoire: “ Le Royaume de Dieu est proche”. Et comme Dieu ne peut s’imposer par la gloire ni employer la force sous peine de violenter notre liberté, nous sommes appelés à nous convertir.

“CONVERTISSEZ-VOUS”: il s’agit de bien plus que se repentir, de se frapper la poitrine, d’alimenter un vague sentiment de regret. Mais d’une décision et d’un acte. Prenez conscience que vous vous êtes égarés sur le chemin qui mène à Dieu, que vous avez adopté un comportement qui lui déplaît et revenez sur vos pas. Ne vous contentez pas de regretter vos fautes.

Et surtout ne désespérez jamais ! Quelle que soit l’énormité de vos méfaits et quel que soit le nombre de vos chutes. Le mal n’est pas de tomber mais de refuser de se relever. Le désespoir, c’est la nuit qui refuserait l’aurore.

C’est pourquoi, dans toute la Bible, la conversion est considérée comme une merveille de la révélation. Si l’homme doit se considérer comme responsable de ses actes, il n’est cependant pas victime d’un destin inexorable, il n’est pas prisonnier de son passé. Après des années de débauche, le fils prodigue peut décider d’entreprendre le chemin du retour: loin de le rejeter son père l’attend et le presse tendrement sur son cœur. En hébreu, la conversion se dit par le verbe “revenir” (shoub)

Cette conversion doit manifester sa sincérité par un acte:

“ De Jérusalem, de Judée, de toute la région, les gens venaient à Jean et ils se faisaient baptiser par lui dans le Jourdain en reconnaissant leurs péchés”.

Chose très étonnante. On a appris par les premiers chapitres de l’évangile que ce Jean est le fils du prêtre Zacharie et de son épouse Elisabeth. Or le sacerdoce juif étant héréditaire, Jean devrait donc, à l’exemple de son père, exercer les rites d’expiation des péchés par des offrandes et des supplications dans le temple de Jérusalem.
Dans la communauté de Qumran, pas loin de là, sur les bords de la Mer Morte, des hommes avaient déjà fait sécession avec le temple et ils pratiquaient les rites individuels de pardon par des ablutions continuelles.

Jean, lui, va plus loin: prêtre devenu prophète, il exhorte les gens à lui confesser publiquement leurs fautes et il est l’acteur du baptême unique.

LE RITE POUR DIEU OBLIGE A L’ACTE POUR LE PAUVRE

Parmi la foule des candidats qui se présentent, Jean distingue deux catégories:

Voyant des pharisiens et des sadducéens venir en grand nombre à ce baptême, Jean leur dit: “ Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc un fruit qui exprime votre conversion. Et n’allez pas dire en vous-mêmes: “Nous avons Abraham pour père” Car je vous le dis: avec les pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham”.

Les pharisiens sont des laïcs, des fidèles ordinaires animés d’un grand zèle pour la Loi et qui compensaient le relâchement de beaucoup en s’astreignant à des observances très strictes, en allongeant les prières, en ajoutant des jeûnes, en accumulant les gestes de piété et de purification.

Les sadducéens, eux, étaient des membres des grandes familles sacerdotales, très soucieux des fastes liturgiques, du decorum du temple, de l’accomplissement minutieux des rites, de la beauté impeccable des cérémonies.

Or c’est à ces hommes qui paraissent comme les croyants modèles que Jean s’en prend violemment, et non à des malfaiteurs connus, des prostituées, des voleurs, des publicains. Il leur reproche deux choses graves.

D’abord leurs observances pieuses et leurs pratiques cultuelles, c’est-à-dire leurs devoirs envers Dieu, ne s’accompagnent pas d’actions de solidarité et de justice à l’égard de leur prochain. Leur demande du baptême est purement formelle: ce ne sera jamais qu’un rite supplémentaire.

Jean les presse de produire des fruits qui témoigneront de l’authenticité de leur démarche – donc la solidarité, le partage, la justice. Nulle liturgie pour Dieu ne dispense de l’amour du prochain.

Et d’autre part ces hommes se drapent dans leur privilège de membres du peuple élu, comme si être de la descendance d’Abraham était un certificat donnant bonne conscience et assurance. Dieu peut travailler les coeurs durs des grands pécheurs de toutes les nations et les faire participer à son Royaume.

Jean-Baptiste continue la lignée des grands prophètes qui rappelaient que Dieu exige une conversion véritable et dénonce un culte hypocrite:
“ Cessez d’apporter de vaines offrandes…Je déteste vos solennités. Vous avez beau multiplier les prières, je n’écoute pas…Apprenez à faire le bien, recherchez la justice; faites droit à la veuve et l’orphelin” (Isaïe 1, 9)

UN TOUT AUTRE VIENT ENSUITE

Le Baptiste a beau être persuadé de l’authenticité divine de sa vocation, mener une vie ascétique, lancer avec fougue ses appels à la conversion, dénoncer avec courage les perversions de certains candidats, il en vient à constater les limites de son travail. Il demeure au niveau de ses grands ancêtres Moïse, Elie, Isaïe, tous convaincus d’être des messagers de Dieu mais se heurtant à ce qui reste toujours chez les hommes une bonne volonté impuissante. Si souvent nous disons oui avec la tête mais non avec le cœur (J. Prévert)

Jean se comprend comme un simple précurseur et il annonce la venue d’un autre qui sera d’un niveau infiniment supérieur au point que Jean avoue qu’il n’est pas digne d’être son esclave. Cet anonyme dont il ne dit pas le nom – et qui évidemment sera Jésus – proclamera lui aussi la venue du Royaume, exigera la conversion mais sa Parole sera portée par le souffle divin et elle transmettra l’Esprit de Dieu capable d’ouvrir les cœurs. Là est la Bonne Nouvelle. Jésus va pouvoir inaugurer le Royaume de Dieu sur terre.

“Moi, je vous baptise dans l’eau pour vous amener à la conversion. Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales.
Lui vous baptisera dans l’Esprit-Saint et le feu. Il tient la pelle à vanner dans sa main, il va nettoyer son aire à battre le blé et il amassera le grain dans son grenier. Quant à la paille, il la brûlera dans un feu qui ne s’éteint pas.”

Ce Jésus, dit Jean, ne sera pas seulement un prophète exceptionnel qui pourrait être suivi par d’autres. C’est Lui, et Lui seul, qui opérera l’oeuvre finale de Dieu, le jugement ultime et décisif que la tradition imaginait sous forme de la moisson.

Jean imaginait-il que son successeur allait provoquer la déflagration finale, la fin des temps avec le déchaînement de la Colère de Dieu ? La suite de l’Évangile montrera un Jésus “doux et humble de cœur” (12,18) pour qui le feu de l’Esprit n’est pas un cataclysme ravageur mais un feu d’amour tel qu’il est capable de brûler nos résistances égoïstes et tout ce qui en nous fait obstacle à la volonté de Dieu.

C’est ainsi que Pierre, à la Pentecôte, proclame la Bonne Nouvelle:
“Sachez-le avec certitude: Dieu l’a fait Seigneur et Messie, ce Jésus que vous avez crucifié…Convertissez-vous: que chacun reçoive le baptême au nom de Jésus Christ pour le pardon de ses péchés et vous recevrez le don du Saint-Esprit…” (Actes 2, 36)

CONCLUSION

Jean-Baptiste était un précurseur: nous pouvons, nous devons, après Pierre, Paul et tant d’autres, être les successeurs. D’abord en nous convertissant: en sortant d’une religion rétrécie au terrain de notre tranquillité, une religion aménagée pour ne pas trop nous déranger. Et en écoutant la Parole de Jésus, forte, exigeante, mais portant l’Esprit qui nous retourne et nous fait prendre la direction inverse.

Travail jamais fini, toujours à reprendre. Infiniment plus difficile que pour préparer un décembre de fêtes. Travail souvent dans l’ombre des dévouements discrets mais aussi parfois dans l’annonce hardie de la Bonne Nouvelle.

Saint Jean Baptiste: aide-nous à adopter une vie plus sobre, à vivre et proposer des changements urgents, à ne pas nous prendre pour des sauveurs mais pour des témoins de Celui qui allume le feu de l’amour.

Frère Raphaël Devillers, dominicain

Saint Bernard

SAINT BERNARD : LES TROIS VENUES DU CHRIST

Il y a une triple venue du Seigneur.

Dans sa première venue, il a paru sur la terre et il a vécu avec les hommes. Ils l’ont vu et l’ont pris en haine.

Lors de sa dernière venue, toute chair verra le salut de notre Dieu et ils regarderont celui qu’ils ont transpercé.

La venue intermédiaire, elle, est cachée: les élus seuls la voient au fond d’eux-mêmes et ils sont sauvés.

Ainsi donc il est venu d’abord dans la chair et la faiblesse; puis, dans l’entre-deux, il vient en esprit et en puissance; enfin il viendra dans la gloire et la majesté.

Cette venue intermédiaire est vraiment comme la voie par laquelle on passe de la première à la dernière.
Dans la première, le Christ fut notre rédemption; dans la dernière il apparaîtra comme notre vie; et entre-temps il est notre repos et notre consolation.

Pour que personne ne pense que cette venue intermédiaire est de notre invention, écoutons ce que le Seigneur dit lui-même: “Si quelqu’un m’aime, il gardera mes paroles, mon Père l’aimera et nous viendrons à lui”.

Comment te faut-il garder la Parole de Dieu ? Fais-la entrer dans la profondeur de ton âme, puis qu’elle passe dans les mouvements de ton coeur et dans ta conduite.

Si tu t’es mis à garder en toi la Parole de Dieu, nul doute qu’elle ne te garde aussi. Le Fils viendra à toi avec le Père.
Il faut que le Christ occupe toute la place, lui qui a créé l’homme dans sa totalité, qui le rachète intégralement et le glorifie dans son entièreté.

SAINT BERNARD : SERMON POUR L’AVENT