Mgr Georges Pontier est l’ancien président la Conférence des évêques de France : il vient d’achever son mandat d’administrateur apostolique de Paris suite à la démission de Mgr Aupetit.
Extraits de son interview dans le journal « La Croix » du 15 04 2022.
- L’avenir de l’Église passe-t-il par de grandes métropoles ?
… Ce dont nous avons le plus besoin, c’est de croyants qui changent leur vie à cause de leur foi…Que nous réserve l’Esprit-Saint pour l’évangélisation d’un monde en mutation ?…Nul ne le sait. Je ne suis pas pessimiste mais interrogatif. Il y a plein de choses que je n’aurais pas imaginées.
- Le vendredi saint, personne n’imaginait le matin de Pâques.
Oui, c’est pour cela que ce qui est au coeur de notre foi, ce n’est pas l’énergie venue de la foule qui entourait Jésus le jour des Rameaux mais l’énergie venue de l’amour de Dieu pour l’humanité. C’est Jésus et ce projet de Dieu qui sont à la source de tout. Il vient apporter une force nouvelle.
Le vendredi saint, il y avait une personne, Jésus de Nazareth, dans une situation où tout était signe de mort ou d’échec. Son action par petits gestes, était lisible pour Marie sa mère, quelques femmes, Jean le disciple, qui pouvaient voir la manière dont il insufflait de l’amour alors qu’il aurait pu vouloir se venger, dire du mal…Par exemple la manière dont il dit : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font… »
Quand on voit l’énergie, la puissance de fidélité qui émane de lui, on se dit : « Voilà notre Dieu et il ne nous abandonnera pas ». Dans le vendredi saint il y avait déjà en germe la puissance de la Résurrection, et ce germe c’était lui, Jésus, et la manière dont il traversait ce drame…
Il y a des moments où à vue humaine on ne le perçoit plus. Comme sûrement en Ukraine aujourd’hui, les gens prient car c’est un peuple croyant. Et ce qui les soutient, c’est cette foi alors que tout est animé par la peur et par la mort.
- Comment garder l’espérance dans l’humanité face aux atrocités commises là-bas ?
Nous assistons à un nombre incalculable de petite solidarités à l’œuvre, une puissance intérieure qui va finir par triompher. Parce qu’il y a des hommes et des femmes solidaires qui risquent leur vie.
- Comment avez-vous conçu votre mission à Paris pour apaiser, retisser du lien après le départ de Mgr Aupetit ?
Quand on traverse une épreuve forte, si on continue à se regarder soi-même, on ne peut être que démoli. Donc il faut regarder vers le Christ et vers les plus pauvres. On est sûr de ne jamais se tromper quand on sert les pauvres. C’est ensemble, en se retournant vers le Seigneur, en évitant de se juger, de se diviser, de se prendre pour quelqu’un qui sait tout expliquer, que l’on peut avancer.
Nous sommes fragiles mais nous sommes forts si nous résistons à la tentation de donner des leçons. Ce n’est pas parce que l’autre ne voit pas les choses tout à fait comme moi qu’il est « idiot » ou « moins chrétien ». S’écouter, ne pas rester qu’entre semblables qui remuent leur soupe en rajoutant du vinaigre dans le plat qu’ils vont servir à tout le monde, se retourner vers le service des pauvres et vers la Parole de Dieu, c’est ce que nous avons fait avec les prêtres. (…)