Par MARTIN STEFFENS, PHILOSOPHE
Le philosophe et chroniqueur à La Vie estime que l’incendie qui a frappé la cathédrale Notre-Dame de Paris doit pousser les chrétiens à renouer avec le prophétisme. Elle permet au peuple de Dieu de s’incarner, aux croyants de se rassembler.
Voyez-vous une symbolique spirituelle dans cet événement ?
Ce qui m’a d’abord frappé, c’est qu’il s’agit d’un symbole au sens littéral. D’ordinaire, un symbole, c’est toujours au second degré ; ici, c’est au pied de la lettre. C’est bien le cœur de l’Église qui brûle ! Et nous sommes sidérés, non pas par une absence de sens, mais par un surcroît de sens. Un sens devenu très sensible. « Les pierres crieront », disait Jésus dans l’Évangile de dimanche des Rameaux (Luc 19, 40). À Notre-Dame, lundi soir, elles hurlaient ! Notre parole était coupée ; les choses parlaient d’elles-mêmes.
En outre, le fait que la Vierge Marie soit atteinte, à travers cette cathédrale, a une très forte résonance avec l’histoire de notre pays, lieu de multiples apparitions mariales. Marie est celle qui pleure au pied de la Croix ; et voilà qu’elle était celle qui brûle. C’est cela, la semaine sainte : pleurer en Jésus, devant le monde incendié par le mal.
Je pense enfin que cet événement sidérant est un double affront pour l’homme occidental. Non, la domination technique n’est pas absolue, car elle n’a pu arrêter l’incendie assez tôt. Non, l’histoire, dans toute sa tragédie, n’est pas terminée. Elle redémarre et redonne vie à des symboles, des objets, des édifices, que l’on avait muséifiés
Paru dans LA VIE 18 avril 2019.