Homélies et commentaires par fr. Laurent Mathelot OP

Résurgences

27 Janvier : Jour de la Shoah

Le Message du 27 janvier

27 janvier 1945, vers onze heures, il y a 76 ans. Une première patrouille de l’Armée Rouge pénétra dans le camp d’Auschwitz III, puis dans l’après-midi dans Birkenau et dans Auschwitz I. Il y avait encore environ 7.000 détenus survivants.

Les soldats soviétiques furent saisis d’horreur. Il fallut encore de nombreux mois de combat pour que l’ensemble du système concentrationnaire nazi fût démantelé, jusqu’au 8 mai inclus, avec la libération du camp de Terezin près de Prague. Pour tous les soldats soviétiques, américains, britanniques, français qui eurent à pénétrer dans les camps, ce fut la sidération.

Ces soldats se battaient sur tous les fronts depuis des années…Mais ils découvrirent là l’inimaginable, l’ignominie absolue, le système concentrationnaire nazi.

 Pourtant les nazis avaient cherché à camoufler leur crime, en contraignant les malheureux déportés déjà exténués à d’invraisemblables marches dans le froid glacial de l’hiver, les « Marches de la mort », et en faisant sauter les chambres à gaz.

Et encore, ces soldats ignoraient-ils ce que l’on découvrit peu à peu, à mesure que des témoignages purent s’exprimer, et que des études historiques purent être réalisées : l’organisation d’un véritable système concentrationnaire, allant jusqu’aux détails les plus infimes pour humilier et faire souffrir toujours plus ; l’arrachement à leur vie quotidienne, à leurs foyers, de millions d’hommes et de femmes, de vieillards, d’enfants de tous âges, avec des rafles brutales organisées dans toute l’Europe ; leur transport dans des conditions immondes vers les camps ; les chambres à gaz pour les plus faibles dès l’arrivée après une sélection rapide, la survie en enfer pour les autres qui se retrouvaient dans ce « royaume de la malédiction » dont parla Élie Wiesel.

Tous les camps avaient en commun une organisation minutieuse et sadique pour non seulement tuer, mais surtout pour dépouiller les prisonniers de leur dignité de personne humaine. Ils avaient drainé des millions d’hommes et de femmes, de vieillards et d’enfants arrachés brutalement à leurs maisons, à leurs familles, dans tous les pays d’Europe, parce qu’ils étaient juifs.

Élie Wiesel le rappela dans son témoignage au procès de Klaus Barbie : « Le juif fut condamné à la mort parce qu’il était né juif, parce qu’il portait en lui une mémoire juive »
 
Comme chaque année, nous faisons mémoire de cette libération dans toute l’Europe et ailleurs dans le monde, avec la Journée internationale de la Mémoire des Victimes de la Shoah et de Prévention des crimes contre l’Humanité instituée en octobre 2002 par les ministres de l’Éducation des États membres du Conseil de l’Europe, et adoptée en 2005 par les Nations Unies.

Pourquoi faire Mémoire ? Bien sûr pour rendre hommage aux victimes, mais aussi parce que le temps présent confirme chaque jour la justesse et l’actualité de la crainte exprimée par Primo Levi lorsqu’il disait : « L’idée d’un nouvel Auschwitz n’est certainement pas morte, comme rien ne meurt jamais. Tout resurgit sous un jour nouveau, mais rien ne meurt jamais. »
 
La barbarie n’est pas morte. Elle est même bien vivante. Elle s’active sur tous les continents, avec la nouvelle barbarie djihadiste, en France, en Europe, et dans le monde entier, en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie. Une barbarie d’une cruauté inouïe, dont sont victimes juifs, chrétiens et musulmans, et particulièrement les femmes et les enfants, tandis que dans notre propre pays des attentats tuent, et que la haine des juifs se manifeste ouvertement, quotidiennement, sans complexe.
 
En janvier 2016, le pape François en visite à la Grande Synagogue de Rome, rappela la nécessité de l’acte de Mémoire :« Le passé doit nous servir de leçon pour le présent et l’avenir. La Shoah nous enseigne qu’il convient d’être toujours extrêmement vigilants, pour pouvoir intervenir à temps dans la défense de la dignité humaine et de la paix. »


Être vigilants, tel est le Message du 27 janvier. 

Jean-Dominique Durand
Président de l’AJCF — Amitié judéo-chrétienne de France


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