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CROIRE ET SERVIR


27ème dimanche ordinaire – Année C – 6 octobre 2019
Évangile de Luc 17, 5-10

27ème dimanche ordinaire – Année C – 6 octobre 2019 – Évangile de Luc 17, 5-10
THERESE DE L’ENFANT JESUS, CARMEL DE LISIEUX ( 1873 – 1897)
Fêtée ce 1er octobre
Beaucoup ont encore de Thérèse une image doucereuse, infantile, presque insupportable. Réputation totalement fausse. Dans une France emportée par le progrès, à côté d’intellectuels gagnés au scientisme, quand se proclamait “la mort de Dieu” et que la religion était dénoncée comme “l’opium du peuple”, Thèrèse, enfermée dans son carmel, a été plongée dans l’immense souffrance physique de la tuberculose et, plus terrible encore pour une contemplative, la souffrance de l’athéisme.

En juin 1897, elle poursuit la rédaction de ses souvenirs pour sa Prieure et elle lui confie l’épreuve cachée de toutes et qui la torture.

“Aux jours du temps pascal, Jésus m’a fait sentir qu’il y a véritablement des âmes qui n’ont pas la foi… Il permit que mon âme fût envahie des plus épaisses ténèbres et que la pensée du ciel ne soit plus qu’un sujet de combat et de tourment …Cette épreuve ne devait pas durer quelques jours, quelques semaines, elle devait ne s’éteindre qu’à l’heure marquée par le bon Dieu…et cette heure n’est pas encore venue…

Seigneur, votre enfant vous demande pardon pour ses frères…Ne peut-elle pas dire en son nom, au nom de ses frères: “Ayez pitié de nous, Seigneur, car nous sommes de pauvres pécheurs…Que tous ceux qui ne sont point éclairés par le lumineux flambeau de la foi le voient luire enfin.”
…Il me semble que les ténèbres me disent en se moquant de moi: Tu rêves la lumière…tu rêves la possession éternelle du Créateur de toutes ces merveilles, tu crois sortir un jour des brouillards qui t’environnent. “Avance, avance, réjouis-toi de la mort qui te donnera non ce que tu espères, mais une nuit plus profonde encore: la nuit du néant…”… Je ne veux pas en écrire plus long, je craindrais de blasphémer.

Jésus sait bien que tout en n’ayant pas la jouissance de la foi, je tâche au moins d’en faire les oeuvres. Je crois avoir fait plus d’actes de foi depuis un an que pendant toute ma vie…
Je cours vers mon Jésus, je lui dis être prête à verser jusqu’à la dernière goutte de mon sang pour confesser qu’il y a un ciel…”

MANUSCRIT AUTOBIOGRAPHIQUE C 5 r° et ss.


La maladie affaiblit Thérèse de plus en plus: elle doit arrêter la rédaction sur ces mots :
“Oui, je le sens, quand même j’aurais sur la conscience tous les péchés qui se peuvent commettre, j’irais, le coeur brisé de repentir, me jeter dans les bras de Jésus, car je sais combien il chérit l’enfant prodigue qui revient à lui.”

Le 30 septembre, après une dure agonie, elle meurt en murmurant : “Mon Dieu, je vous aime”.


ÉVANGILE DE LUC 17, 5-10

CROIRE ET SERVIR


Si beaucoup de gens attendaient un Messie qui ferait une entrée tonitruante dans l’histoire, en écrasant les ennemis et en apportant d’un coup l’indépendance et la paix d’Israël, les auditeurs de Jésus étaient intrigués, comme nous le sommes encore aujourd’hui, par la nature de ce Royaume dont il annonçait la venue.

Loin de règler d’un coup tous les problèmes et d’offrir à tous un bonheur tout préparé sur un plateau, Jésus appelait les volontaires à un changement radical de leur vision de l’histoire, à une conversion de leurs comportements, à un engagement à sa suite.

Son Evangile n’était pas la fin du monde ni même son annonce mais un appel à le changer dès maintenant. Croire en Dieu devenait décider de vivre comme Jésus, le Messie, l’exigeait. La foi en Jésus le Sauveur impliquait dans le même élan d’être sauveur avec lui, d’entrer dans un peuple qui était messianique.

De dimanche en dimanche, en suivant l’évangile, nous restons encore frappés par la radicalité de ses options non négociables, par l’âpreté de son programme sur lequel il ne transige pas.

Jésus ne raccole pas des fans en transe: il ne rêve jamais de faire l’unanimité. Il veut “des disciples” qui écoutent ce qu’il dit, qui s’appliquent à le comprendre et qui s’engagent, avec leur fragilité, à le mettre en pratique. On devine que bien des gens qui, au début, le suivaient dans l’enthousiasme parce qu’ils avaient été les témoins de ses guérisons spectaculaires, ont peu à peu décroché et se sont détournés d’un prophète qui semblait demander l’impossible. Une religion consolatrice, oui. Une foi mobilisatrice, non.

Rappelons certains de ces enseignements dont plusieurs ont été commentés ces derniers dimanches:
  • Jésus provoque des scissions au sein même des familles (12, 51), mais il faut le préférer à tous.
  • L’entrée dans son Royaume est étroite et impose beaucoup d’efforts pénibles (13, 24)
  • Gare à l’orgueil: celui qui s’élève sera abaissé et celui qui s’abaisse sera élevé (14, 11)
  • Inviter des pauvres qui ne pourront rendre la pareille (14, 13)
  • Un disciple doit porter sa croix, marcher à ma suite (14, 27)
  • Les disciples vertueux doivent accueillir avec joie leur frère prodigue qui revient après avoir beaucoup péché (15)
  • Danger gravissime de l’argent: impossible de servir Dieu et Mammôn (16, 13)
  • Méditer les Ecritures pour nous convertir et voir enfin le pauvre Lazare qui attend notre aide (16, 29)
La série se termine par deux leçons importantes qui malheureusement ne sont pas lues en liturgie:
  • Malheur à celui qui cause le scandale, c.à.d. qui fait perdre la foi à un simple croyant. Il vaudrait mieux pour lui d’être jeté à la mer, une meule au cou. Tenez-vous sur vos gardes. (17, 1)
  • Si ton frère t’offense et qu’il se repent, tu lui pardonneras – même 7 fois par jour (17, 4)


STUPEUR DES APOTRES

Ces deux derniers avertissements sont comme la goutte qui fait déborder la sidération des Apôtres qui tout à coup entrent en scène.

Les Apôtres dirent au Seigneur : “Augmente en nous la foi”.
Le Seigneur dit: “ La foi, si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, vous diriez au grand arbre que voici: Déracine-toi et va te planter dans la mer – et il vous obéirait”.


On comprend la raison de cet appel pathétique.

En effet ces premiers responsables de la prédication de l’Evangile sont tenus de l’annoncer dans son intégralité, et donc d’abord de le vivre eux-mêmes. Ils vont devoir s’en aller partout, circuler, annoncer l’enseignement de Jésus Seigneur avec une entière fidélité, sans l’affadir.

Ils feront des disciples qui à leur tour seront perplexes devant certains préceptes et renâcleront devant des ordres estimés exagérés, trop durs à appliquer.

Donc, devant les perspectives qui les attendent, les apôtres prennent conscience qu’ils sont très démunis, que la mission n’est pas simple affaire humaine, question de technique, de compétence, d’éloquence, d’intelligence, de sens de l’organisation. Il faudra veiller à ne jamais scandaliser les croyants et à leur offrir une miséricorde perpétuelle.

Annoncer l’Evangile, faire découvrir Jésus Seigneur, donner naissance à des disciples, les convaincre de changer de vie et d’observer l’entièreté des préceptes évangéliques, est une oeuvre de foi, càd. d’une confiance totale en Jésus. Et cette foi-confiance, il faut la lui demander car seul Jésus peut la donner.

On n’a pas oublié l’épisode où le père de l’enfant épileptique s’était plaint à Jésus car il avait présenté son garçon aux apôtres qui avaient échoué à le guérir et Jésus les avait sèchement rabroués: “Génération incrédule et perverse, jusqu’à quand aurais-je à vous supporter ?” (9, 41)

Ici la réponse de Jésus étonne. Il ne faut pas imaginer la foi comme un capital à faire grossir par des études théologiques ou par des expériences spéciales. La foi chrétienne est un lien qui toujours paraît fragile, menacé, sans force, souvent non ressenti, comme une graine minuscule à côté des immenses savoirs du monde. Mais lorsque ce grain est accepté dans les profondeurs de l’être, il rend le disciple capable de provoquer l’impossible. Ce que Jésus traduit ici par une image évidemment symbolique. La foi n’est pas magie.

Il faudra la croix et la résurrection pour que, enfin, les apôtres s’ouvrent à la petite flamme de l’Esprit et parviennent, par la foi, à accomplir les miracles de la conversion au nom du Seigneur.

Mais il ne faudrait pas, du coup, que ces intendants se prennent la tête: Jésus les renvoie à l’humilité.


LA RECOMPENSE EST DANS LE SERVICE

Jésus ajoute la parabole du serviteur.

“Lequel d’entre vous, quand son serviteur vient de labourer ou de garder les bêtes, lui dira à son retour des champs: “Viens vite à table” ? Ne lui dira-t-il pas plutôt: “Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, le temps que je mange et que je boive. Ensuite tu pourras manger et boire à ton tour.
Sera-t-il reconnaissant envers ce serviteur d’avoir exécuté ses ordres ?
De même vous aussi, quand vous aurez fait tout ce que Dieu vous a commandé, dites-vous: “Nous sommes de pauvres serviteurs, nous n’avons fait que notre devoir”.


L’existence des Apôtres ne sera pas toujours un long fleuve tranquille: ils seront suspectés, arrêtés, jugés, emprisonnés…Mais cependant ces hommes de condition modeste, sans fortune ni diplomes, vont en quelques dizaines d’années voyager au loin, rencontrer des étrangers, fonder un réseau de petites communautés, parfois même réaliser des guérisons spectaculaires et se faire admirer. Destin bien inattendu depuis le temps où certains n’étaient que de simples pêcheurs du lac de Galilée.

Légitimement ils seront heureux de quelques succès, ils aimeront raconter leurs réussites. Surtout qu’ils ne s’enorgueillissent pas, qu’ils ne mettent jamais l’Eglise avant le Christ Seigneur, qu’ils cessent de chanter “qu’ils construisent le Royaume” (sic).

Que leur joie soit d’être des serviteurs. Non pas “quelconques ou médiocres ou inutiles” comme disent de mauvaises traductions: Jésus n’a pour eux nul mépris.
Mais des serviteurs qui ne montent pas les tapis rouges, qui ne plastronnent pas en exhibant les progrès de leur entreprise, en gonflant des statistiques ou, pire encore, en se comparant les uns aux autres.

Ils n’avaient aucun titre à être appelés, ils ont reçu une mission, une tâche à accomplir. Et il s’agit de la mission la plus essentielle, la plus centrale, la plus colossale de l’histoire de l’humanité. Et ils n’en sont que des acteurs qui ont reçu la Parole à proclamer, la force de la réaliser.

C’est Jésus qui les a appelés; c’est lui qui les a formés, enseignés; c’est sa croix qui leur a pardonné leur lâcheté; c’est sa Résurrection qui les a enrichis d’espérance; c’est l’Esprit qui les inspire, les pousse en avant, les relève, les remplit de certitude et d’assurance.

Leur joie est de dire simplement: “J’ai fait tout ce qui m’a été demandé”. Et quand ils célèbrent le repas du Seigneur, ils reconnaissent que ce n’est pas une récompense de leurs mérites mais la source d’un amour qui les provoque à toujours servir mieux.


CONCLUSION

Etre responsable d’une communauté chrétienne n’est pas tâche simple. Il y faut beaucoup de foi, une infinie patience pour toujours recommencer, un grand courage pour ne pas trahir l’Evangile et lui enlever son tranchant, et une miséricorde sans limites envers les frères lents à comprendre.
Servir le Seigneur de tout son être: la joie est dans ce service.
FAIRE TOUT CE QUI M’EST DEMANDE.

Frère Raphaël Devillers, dominicain

SAINTE THERESE, PAPE FRANCOIS ET LA MISSION


SAINTE THERESE, PAPE FRANCOIS ET LA MISSION

Le « Mois missionnaire extraordinaire »
sous le signe de sainte Thérèse de Lisieux


Le pape François a ouvert le « Mois missionnaire extraordinaire », aux vêpres de la fête de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de la Sainte-Face, ce mardi 1er octobre, à 18h, à Rome, en la basilique Saint-Pierre.

Une carmélite, cloîtrée, morte à 24 ans, docteur de l’Eglise, patronne des missions, devient ainsi la sainte patronne en quelque sorte du mois missionnaire.

Le 14 décembre 1927, le pape Pie XI avait proclamé Thérèse patronne principale des pays de mission à l’égal du grand saint jésuite François Xavier (1506-1552).

En effet, au lendemain de la canonisation de Thérèse en 1925, « une pétition demandant que Thérèse soit proclamée patronne des missions était adressée au Pape, d’abord par les évêques missionnaires du Canada, puis par tous ceux qui, dans le monde entier, adhérèrent avec enthousiasme à la requête (232 au total) ».

Sainte Thérèse écrivait: « Je voudrais parcourir la terre, prêcher ton nom et planter sur le sol infidèle ta Croix glorieuse, mais, ô mon Bien-Aimé, une seule mission ne me suffirait pas, je voudrais en même temps annoncer l’Évangile dans les cinq parties du monde et jusque dans les îles les plus reculées… Je voudrais être missionnaire non seulement pendant quelques années mais je voudrais l’avoir été depuis la création du monde et l’être jusqu’à la consommation des siècles » (Manuscrits autobiographiques, Manuscrit B, 3 r )

Un moment, la carmélite a pu envisager de partir au Vietnam actuel: « Thérèse, explique le carmel normand, avait un ardent désir missionnaire que Thérèse d’Avila (1515-1582) souhaitait pour ses filles carmélites. Elle disait être entrée au carmel pour sauver les âmes. Elle aurait aimé partir pour le carmel de Hanoï que venait de fonder le carmel de Saïgon. La découverte de sa maladie empêcha ce projet. »

Mais sa mission a été de porter les missionnaires dans sa prière : « En 1895, sa prieure lui confie le le Père Bellière, séminariste songeant à la mission en Afrique. Elle est attentive à sa formation comme prêtre et comme homme, et se montre patiente et encourageante, affectueuse et ferme.

Puis sa prieure lui confie un deuxième missionnaire, le P. Roulland, des Missions Etrangères de Paris, en partance pour la Chine. Thérèse écrit au P. Roulland lorsqu’il commence son travail missionnaire en Chine. Elle collabore totalement avec lui dans son apostolat. Chacun d’eux considère comme sien ce que l’autre réalise. »

Dès son premier grand voyage apostolique, à Rio de Janeiro (Brésil), le pape François a confié combien il aimait sainte Thérèse: dans sa fameuse sacoche noire, il y avait un livre sur elle: elle l’a en quelque sorte accompagné aux JMJ de 2013.

Ils ont en commun non seulement le souci de la mission, mais la manière de la mener : par l’annonce de la miséricorde. On cite souvent l’Acte d’offrande à l’Amour miséricordieux que Thérèse a fait puis promu auprès de ses soeurs carmélites.

La biographie du pape François par Francesca Ambrogetti et Sergio Rubin (“Je crois en l’homme: Conversations avec Jorge Bergoglio, Flammarion) révèle un détail de cette amitié spirituelle : « Lorsque j’ai un problème, je demande à la sainte non pas de le résoudre, mais de m’aider à l’assumer, et en guise de signe, je reçois presque toujours une rose blanche » (p. 148).

Le pape a une image de la « petite Thérèse » sur son bureau (p. 147).

Le biographe britannique Austen Iverreigh rapporte qu’au moment du conclave, le 12 mars 2013, lorsque le cardinal Bergoglio entra dans sa chambre – n° 207 – à Sainte-Marthe, il a trouvé une rose blanche sur son lit.

ZENIT 25. 09. 2019

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