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3ème dimanche de Carême – Année B – 7 mars 2021

Évangile de Jean 2, 13-25

Pas de trafic dans la Maison du Père

3ème dimanche de Carême - Année B – 7 mars 2021 – Évangile de Jean 2, 13-25
La « Banque du Saint-Esprit » créée en 1605 par le pape Paul V et banque du Vatican jusque 1992 fut ainsi appelée parce qu’elle a débuté dans une annexe de l’hôpital «Santo Spiritu». Était-ce une raison de lui attribuer dénomination aussi incongrue ?...

Banque : François fait le ménage

Le pape François a nommé le jésuite espagnol Juan Antonio Guerrero Alves en tant que préfet du Secrétariat aux affaires économiques (Ministre de l’économie). «La réforme financière se poursuit, sur le versant de la transparence et de la maîtrise des coûts», a promis le Saint-Siège. L’administration financière du Vatican avait fait la une des journaux en raison de la spéculation immobilière et des enquêtes internes pour corruption.

Comme les résistances au changement semblaient toujours aussi fortes dans la Curie, le pape a pris les choses en main. Au Conseil pour l’Économie, chargé de superviser la gestion et la politique financières du Vatican, il a nommé 7 cardinaux et 7 laïcs, dont 6 femmes. Stupeur de beaucoup ! Il a remplacé le président de l’Autorité d’information financière (AIF), Avant cela, il avait nommé le procureur anti-mafia Giuseppe Pignatone président du Tribunal de l’État du Vatican.

Une façon de montrer sa détermination à mener le combat contre les graves dérives financières du Vatican. Les caisses du Vatican ont été victimes ces dernières années de détournements de fonds, de fraudes et de blanchiment d’argent dans une affaire mêlant corruption et abus de pouvoir.

d’après le Centre catholique des médias Cath-Info, 24.01.2020

Évangile de Jean 2, 13-25

Pas de trafic dans la Maison du Père


Bien que Marc, comme aussi Matthieu et Luc, raconte la scène de la purification du temple, ce n’est pas sa version mais celle de Jean -écrite bien plus tard - que nous écoutons aujourd’hui et il l’a beaucoup approfondie. Au lieu de se passer lors de l’Entrée des Rameaux, Jean l’anticipe et la situe dès le début de la mission de Jésus. D’emblée le heurt avec les plus hautes autorités du temple commence. En outre Jean en fait une révélation stupéfiante du mystère de Jésus, vrai Temple.

Jésus le perturbateur

Descendu dans les eaux du Jourdain, baptisé par Jean, comblé de l’Esprit, suivi de ses premiers disciples, Jésus remonte vers la Galilée et, aux noces de Cana, il effectue son premier signe. De là il descend à Capharnaüm sur les bords du lac mais très vite il repart pour monter à Jérusalem. Remarquez comme ces petites notations géographiques attirent déjà l’attention sur le mouvement de « montée-descente », caractéristique de la Pâque que Jésus va vivre.

La Pâque approche : des multitudes de pèlerins convergent dans l’allégresse vers Jérusalem pour y fêter, pendant 8 jours, la libération de l’esclavage et consommer l’agneau pascal, gage des libérations futures. Et tous chantent la splendeur du nouveau Temple. Certes il a été commandité par l’ancien roi Hérode, criminel et mégalomaniaque et les travaux d’achèvement n’en finissent pas, mais il est la Maison de Dieu, le centre d’Israël, le lieu le plus sacré du monde et où se rend le seul culte authentique.

En entrant par la porte orientale, on découvre tout de suite l’immense cour bordée de colonnades. Mais surprise, elle ressemble à une foire : dans la cohue, derrière leurs petites tables, les changeurs permettent d’obtenir la monnaie pour payer l’impôt du temple et à côté, des marchands vantent les qualités de leurs bêtes. Quelle cacophonie : beuglements et bêlements des animaux, cris et disputes des marchands, débats acharnés pour obtenir des réductions de prix... Alors qu’il y avait toujours eu des marchés de ce genre en ville, l’ancien grand prêtre Hanne, beau-père de Caïphe le grand prêtre en exercice, avait décidé d’ouvrir un nouveau marché à l’intérieur même du temple et nul n’ignorait que la location des emplacements leur rapportait des revenus considérables. Plusieurs grandes familles sacerdotales étaient connues pour leur cupidité.

Jésus entre avec ses disciples et devant ce cirque, il est saisi de fureur : il tresse un fouet avec des débris de cordes pour chasser les animaux (Jésus ne s’en prend évidemment pas aux personnes), renverse les tables et éparpille les piles de monnaie. Il n’accuse pas les marchands de profits malhonnêtes mais d’être à cet endroit.

« Ne faites pas de la Maison de mon Père une maison de trafic »

Lors de son baptême, Jésus a entendu Dieu l’appeler « mon Fils bien-aimé » et, en signe, la colombe de l’Esprit est descendue librement sur lui. Ce Temple géré par les prêtres est donc la maison de son Père : il en est responsable. Ce trafic défigure, profane l’image de Dieu : il est scandaleux que l’accès à Dieu passe par le commerce et les tractations financières. Que des riches puissent offrir de gros animaux afin d’obtenir leur pardon alors que les plus misérables manquent de tout. Pour entrer près de Dieu, l’argent ne peut s’accumuler : il doit rouler, s’éparpiller, se partager. On ne paie pas pour obtenir l’Esprit : Ouvrez la cage aux oiseaux ! On n’achète pas la grâce : par définition elle est « gratuite ».

Vers le Nouveau Temple

L’esclandre causée par cet inconnu provoque évidemment l’effervescence, la stupeur, le scandale. Qui est ce type ? Il se prend pour un prophète : il doit expliquer son acte.

- Quel signe peux-tu nous donner pour justifier ce que tu fais ?
- Détruisez ce temple et en 3 jours, je le relèverai !
- ?? Il a fallu 46 ans pour bâtir ce temple et toi, en 3 jours, tu le relèverais ??!!

La réponse de Jésus est évidemment incompréhensible, à la limite de l’absurde. Jean reconnaît que les disciples n’en ont compris la signification que bien plus tard, lorsque Jésus a été ressuscité des morts. Et elle ouvre sur une révélation prodigieuse.

Ce fameux Temple que Hérode avait voulu pour défier les siècles aura en effet une destinée éphémère : en l’an 66 de notre ère, excédés par les Romains, ces maudits païens qui souillaient la terre sainte, écrasés par les exactions de plusieurs gouverneurs, pressurés par les taxes et impôts de tous genres, persuadés d’avoir réuni la quantité d’armes nécessaire, les mouvements révolutionnaires juifs commencèrent. Ils conduisirent à une guerre terrible qui finalement, en l’an 70 (40 ans après la mort du Christ) s’acheva par l’écrasement, la destruction de Jérusalem et l’incendie du temple. Désastre total !

Mais alors que le peuple d’Israël était épouvanté (plus de temple, donc plus de sacerdoce, donc plus de sacrifices possibles, plus de purification des fautes), les communautés chrétiennes avaient eu la révélation d’un nouveau temple.

Le Corps ressuscité de Jésus est le Saint des Saints du nouveau Temple, éternel, indestructible. Il n’est pas construit de matériaux de pierres, de cèdres et de marbres, il n’est pas localisé sur la carte. Et tous ceux qui croient en Jésus, qui adhèrent à lui par la confiance et la pratique de son commandement, deviennent des « pierres vivantes » de ce temple. En Jésus mort et ressuscité se rend le culte authentique ; se découvrent le Père qui fait miséricorde à ses enfants, le Fils qui est l’agneau offert pour le pardon des péchés, l’Esprit qui, comme une colombe, protège ses enfants de toute calamité.

Le travail de mémoire

A deux reprises, Jean évoque dans son récit le rôle de la mémoire. Lorsque Jésus, après son acte violent, lance à ses adversaires en furie : « Ne faites pas de la Maison de mon père une maison de trafic », Jean note que ses disciples se rappelèrent la parole de l’Écriture : « L’amour de ta maison fera mon tourment ». Dans ce psaume 69, un juste persécuté par ses ennemis dit que son zèle pour le temple lui amènera toujours de grandes souffrances. L’intervention de Jésus le conduira à la mort.

La seconde fois, quand Jésus lance la phrase incompréhensible « En 3 jours je le relèverai », Jean note :

« Quand il ressuscita des morts, ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela : ils crurent aux prophéties de l’Écriture et à la Parole que Jésus avait dite ».

De même, à l’entrée des Rameaux, Jean dira que c’est après la résurrection, que les disciples se rappelèrent et comprirent pourquoi Jésus était monté sur un âne (12, 16).

Des passages de l’évangile ou de la bible peuvent, au premier regard, nous sembler incompréhensibles. De même des événements de notre vie nous bousculent, nous remplissent de peur. Nous ne voyons pas ce que tout cela veut dire. Déconcertés, certains s’éloignent de la foi. Tout s’éclaire (pas toujours tout de suite) si nous invoquons l’Esprit que Jésus a promis et dont il a expliqué un des rôles essentiels :

Le Paraclet, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon Nom, vous enseignera toutes choses et vous fera ressouvenir de tout ce que je vous ai dit...Il vous fera accéder à la Vérité tout entière (16, 13)

Jésus n’a rien écrit, les apôtres n’ont rien noté mais ils ont gardé le souvenir de qu’il a fait et dit. L’Esprit du Christ ressuscité les amènera à pénétrer la signification profonde de ses actes. C’est en amenant ainsi à la compréhension progressive de la réalité de Jésus et du sens des choses dans leur rapport avec lui que l’Esprit enseigne toutes choses (note de la Tob sur ce verset 14, 26). Le travail de mémoire excite la foi.

Conclusions

Déjà, bien avant la disparition du temple d’Hérode, Paul rappelait aux Corinthiens ce qu’il leur avait enseigné : « Vous êtes le temple de Dieu et l’Esprit de Dieu habite en vous ...Donc tout est à vous mais vous êtes au Christ et le Christ est à Dieu » (1 Cor 3, 16 ; 2 Cor 6, 16).

Et la 1ère lettre de Pierre affirmait : « Vous aussi, comme des pierres vivantes, vous êtes édifiés en maison spirituelle pour constituer une sainte communauté sacerdotale, pour offrir des sacrifices spirituels agréables à Dieu par Jésus Christ » (1 Pi 2, 4)

L’Église perd sa crédibilité lorsqu’elle est corrompue par les affaires de trafic...

Sommes-nous « pleins de zèle », engagés dans un travail perpétuel de purification et conscients de l’hostilité qu’il provoquera ? ... Appelons l’Esprit dans la prière afin qu’il nous éclaire davantage sur le mystère de la Résurrection et nous conduise vers la Vérité...Notre culte est-il authentique ?...

Fr. Raphaël Devillers, dominicain.
Amour de Dieu et Amour du Prochain, Culte et Justice

Amour de Dieu et Amour du Prochain
Culte et Justice

Le contrat d’Alliance de Dieu avec Israël est résumé par les dix Commandements écrits sur deux Tables : les devoirs envers Dieu et ceux envers le prochain. Ils sont inséparables. Une des grandes tentations d’Israël est d’édifier des sanctuaires magnifiques, de rendre à Dieu un culte généreux, régulier ...mais qui tolère injustices graves et exploitation des pauvres. Le Seigneur ne supporte pas ce culte hypocrite et il envoie des Prophètes pour le dénoncer et appeler à la conversion urgente. Quelques exemples :

Le Prophète AMOS

Vers – 750, Amos, bouvier du royaume de Juda, reçoit mission d’être prophète de Dieu dans le royaume de Samarie. La prospérité y a provoqué un enrichissement mais aussi des injustices criantes.

« Dans vos assemblées il n’y a rien qui me plaise, dit le Seigneur ; vos sacrifices de bêtes grasses, j’en détourne mes yeux. Éloigne le bruit de tes cantiques ! Que le droit jaillisse comme les eaux, et la justice comme un torrent ! ...Rétablissez le droit au tribunal ».

Le grand prêtre du temple convoque Amos : « Va-t’en, voyant ! Retourne au pays de Juda ! Ne prophétise pas ici, c’est le temple royal ! ».

Le Prophète ISAÏE

Quelques années plus tard, le grand prophète Isaïe se lève à Jérusalem et, lui aussi, dénonce avec violence un culte hypocrite qui tolère l’exploitation des pauvres.

« Écoutez la Parole du Seigneur. Que me fait la multitude de vos sacrifices ? dit le Seigneur Les holocaustes de béliers, la graisse des veaux, j’en suis rassasié...Cessez d’apporter de vaines offrandes ! Je n’en peux plus des forfaits et des fêtes ; je déteste vos solennités. Vous avez beau multiplier les prières, je n’écoute pas ; vos mains sont pleines de sang ! ...

Cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien, recherchez la justice, faites droit à l’orphelin, prenez la défense de la pauvre veuve....Comment Jérusalem est-elle devenue une prostituée, la cité qui était fidèle et juste ?...Tes chefs sont des rebelles, complices des voleurs. Ils aiment les pots-de-vin, ils ne rendent pas justice au pauvre... » (Is 1)

Le vrai Jeûne

Après la destruction de Jérusalem et du premier temple, au retour du long exil à Babylone, les Judéens sont malheureux, ils organisent des jours de lamentation et de prière pour obtenir le soutien de Dieu. Et ils se lamentent de n’être pas exaucés. Mais un disciple d’Isaïe dénonce l’hypocrisie de ces jeûnes :

« Parole du Seigneur. Vous dites : « Que nous sert de jeûner si tu ne le vois pas ? »...Or le jour de jeûne, vous savez tomber sur une bonne affaire, vous brutalisez vos ouvriers. Vous jeûnez mais vous cherchez querelles et disputes et vous frappez le malheureux !

Le jeûne que je préfère c’est : dénouer les liens provenant de la méchanceté, détacher les courroies du joug, renvoyer libres ceux qui sont écrasés, partager ton pain avec l’affamé, héberger les pauvres sans abri, habiller celui est nu. Ne te dérobe pas devant celui qui est ta propre chair...

Alors tu appelleras et le Seigneur répondra. Ta lumière se lèvera, le Seigneur te guidera sans cesse... » (Is 58)

Le surplus de piété envers Dieu
ne compensera jamais le manque de pitié pour le frère

Carême : Temps de Réflexion

Carême : Temps de Réflexion

Pape François : « Un Temps pour changer »
(éd. Flammarion 2020)


Dans son carême au désert, le but de Jésus n’était pas d’abord le jeûne mais la réflexion. Comment remplir ma mission ? Quelles options rejeter ? Quelles décisions prendre ?

Être homme, c’est donner sens à sa vie. D’où des priorités à prendre. Chaque aujourd’hui est une réponse à Dieu et un engagement pour l’homme.

Pendant la crise, le pape François a réfléchi à sa vocation et à la mission de l’Église. Écrit en langage très simple, abordant nos problèmes les plus dramatiques et les plus urgents, son livre peut devenir notre source de réflexion. Que faire en temps de covid-19 ?

Extraits :

« Nous devons prendre conscience de notre je-m’en-foutisme, et nous ouvrir aux bourrasques qui nous parviennent maintenant de tous les coins du monde...Bien sûr nous hésitons. Face à tant de souffrances, qui ne reculerait pas ? Il n’y a pas de honte à trembler un peu. Nous nous sentons à la fois inaptes à la tâche et appelés à l’accomplir.(p. 36)

Cette crise démasque notre vulnérabilité, expose les sécurités fausses sur lesquelles nous avions construit nos vies (p. 48)

Un signe d’espoir dans cette crise est le rôle prépondérant des femmes...Je pense à ces femmes économistes...Leur appel à une révision des modèles que nous utilisons pour gérer les systèmes économiques...Je vois des idées formées à partir de leur expérience dans la périphérie, reflétant une préoccupation concernant l’inégalité délirante entre des milliards de personnes dans une extrême pauvreté et le 1 % le plus riche possédant la moitié des richesses financières du monde ...(p.96 ss)

Le but n’est pas de partager les miettes de notre table, mais à cette table de faire une place à chacun. La dignité des personnes appelle la communion : partager et multiplier les biens, participer ensemble au bien de tous (p.165)

Laisse-toi entraîner, secouer, défier...Lorsque tu sentiras le déclic, arrête-toi et prie. Lis l’Évangile si tu es chrétien. Ou crée simplement un espace en toi pour écouter. Ouvre-toi... décentre... transcende... Et ensuite agis. Appelle , rends visite, offre tes services...(p. 202)

Heureux les fêlés :
ils laisseront passer la lumière.

Michel Audiard
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