Dans un document publié jeudi 9 mai, en vue du Jubilé de 2025, le pape François appelle les chrétiens à déployer la vertu de l’espérance, notamment en multipliant les secondes chances accordées aux plus marginalisés.
Voilà des mois que les pelleteuses ont commencé leur ouvrage, et les travaux sont pourtant loin d’être finis. Au bout de la via della Conciliazione, la grande avenue menant à la place Saint-Pierre, les ouvriers travaillant à la construction du tunnel qui doit permettre aux piétons de passer, sans s’arrêter, du château Saint-Ange à la basilique Saint-Pierre, viennent de mettre au jour des vestiges archéologiques. Ces trouvailles pourraient bien faire prendre du retard aux préparatifs de la ville de Rome, où devraient débarquer 32 millions de pèlerins lors du grand Jubilé de 2025. François n’a en tout cas pas attendu la fin du chantier pour publier, jeudi 9 mai, jour de l’Ascension, la « bulle d’indiction », grand texte lançant les festivités.
« L’espérance ne déçoit pas », martèle François, qui en fait même le titre de son texte d’une vingtaine de pages. Cette espérance est mentionnée à pas moins de cent reprises par le pape. Ce Jubilé, grand événement organisé depuis 1300 par l’Église catholique pour marquer les années les plus symboliques, devra être un signe d’espoir dans un monde marqué par l’incertitude.
« Baisse préoccupante de la natalité »
« Nous rencontrons souvent des personnes découragées qui regardent l’avenir avec scepticisme et pessimisme, comme si rien ne pouvait leur apporter le bonheur » : au fil des lignes, François dessine en effet un monde incertain, marqué par une « baisse préoccupante de la natalité », « où la précipitation est devenue une constante » et où règne « la tentation de se considérer comme dépassé par le mal et par la violence ». À ceux qui l’habitent et en particulier les jeunes, parfois « sans espérance », François rappelle que «l’histoire de l’humanité, et celle de chacun, ne se dirige pas vers une impasse ou un abîme obscur ».
Aux perspectives sombres, le pape oppose « l’espérance chrétienne », un « pilier fondamental ». C’est au nom de cette caractéristique – l’une des trois vertus théologales, avec la foi et la charité – que François appelle à soutenir, au cours de 2025, les plus marginalisés de nos sociétés. Il faut ainsi, demande le pape aux diplomates, « continuer à s’engager à créer, avec courage et créativité, des espaces de négociation visant à une paix durable ».
Visiter les prisonniers et accueillir les étrangers
Aux gouvernants du monde entier, François propose de « prendre des initiatives qui donnent espoir », en particulier aux prisonniers, sous forme « d’amnistie ou de remise de peine visant à aider les personnes à retrouver confiance en elles-mêmes et dans la société », mais aussi de « parcours de réinsertion dans la communauté auquel corresponde un engagement concret dans le respect des lois ». Le pape annonce qu’il ira d’ailleurs lui-même ouvrir l’une des « portes saintes » caractéristiques du Jubilé, et sous laquelle les fidèles sont appelés à passer dans l’année, au sein d’une prison.
À la « communauté chrétienne », François demande d’ouvrir « toutes grandes les portes de l’accueil » des migrants. « Que résonne dans les cœurs la parole du Seigneur qui a dit dans la grande parabole du Jugement dernier : “J’étais un étranger, et vous m’avez accueilli” », écrit le pape, qui poursuit : « Ceux qui possèdent des richesses doivent être généreux en reconnaissant le visage de leurs frères dans le besoin. »
La générosité doit aussi concerner, au premier chef, les dirigeants de ce monde : les « nations les plus riches » doivent se décider à « remettre les dettes des pays qui ne pourront jamais les rembourser », plaide le pape. « C’est plus une question de justice que de magnanimité », juge-t-il, voyant dans cette remise de dette une manière de reconnaître « la gravité de nombreuses décisions » ayant nui aux pays les plus pauvres.
Un texte à verser à l’héritage du pape
Ce texte comporte ainsi tous les grands thèmes du pontificat. Alors que François ne cache pas, devant ses proches, son intention de préparer son héritage, cette volonté de mettre en avant l’espérance face à un monde toujours plus fracassé restera à n’en pas douter l’un des signes du règne de Jorge Mario Bergoglio. Mais dans ces pages, le pape fait aussi l’éloge de la patience, qui « fait beaucoup de bien à soi-même et aux autres ». « Saint Paul recourt souvent à la patience pour souligner l’importance de la persévérance et de la confiance en ce que Dieu nous a promis, mais il témoigne avant tout que Dieu est patient avec nous », écrit François.
La bulle papale détaille aussi les vertus de l’« indulgence plénière » accordée à tous ceux qui participeront à ce Jubilé. Pour l’Église catholique, cette « grâce » permet d’effacer en chacun les traces du péché. Une expérience que les croyants sont invités à vivre à partir du 24 décembre 2024, date d’ouverture officielle du Jubilé.
Loup Besmond de Senneville, Journal La Croix, le 09/05/2024.
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Le calendrier du Jubilé
24 décembre 2024. Début du Jubilé, avec l’ouverture de la Porte sainte de la basilique Saint-Pierre par le pape François.
29 décembre. Célébrations de la messe d’ouverture du Jubilé dans toutes les cathédrales du monde.
24 au 26 janvier. Premier des 36 Jubilés thématiques, consacré au monde de la communication. D’autres suivront tout au long de l’année, par exemple pour les malades, les artistes, les diacres, les sportifs, les responsables politiques ou les détenus.
6 janvier 2026. Clôture du Jubilé, à Rome.