Homélies et commentaires par fr. Laurent Mathelot OP

Résurgences

7ème dimanche de Pâques – Année C – 29 mai 2022 – Évangile de Jean 17, 20 – 26

Évangile de Jean 17, 20 – 26

Assumés de Pied en Cap

En ce temps d’attente qui, à partir de l’Ascension, nous prépare au don de l’Esprit à la Pentecôte, nous écoutons la dernière partie de la grande prière qui clôture le discours d’adieu de Jésus à ses disciples. En relisant le grand ensemble des 5 chapitres, on admire comment Jésus assume ses disciples de manière globale : voici comment « il les aima jusqu’au bout, jusqu’à l’extrême ». Cela vaut pour nous.

D’abord tout à l’inverse du messie impérial attendu, Jésus s’est présenté comme un serviteur de basse condition qui s’agenouillait devant chaque disciple pour lui laver les pieds. Se laisser purifier par un sauveur pauvre et accepter à son tour de se mettre au service des autres, voilà la première condition pour marcher vers le Royaume en construction.

Ensuite Jésus nourrit leurs corps en partageant son repas : chacun reçoit « une bouchée », un petit morceau de pain. Car le disciple a besoin du Pain de Vie pour vivre la communion avec les autres et avoir la force de nourrir ceux qui ont faim.

Alors, lavés et nourris, les disciples reçoivent le commandement nouveau : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ». Ne rivalisez plus entre vous, ne cherchez plus la grandeur et le faste. Tout au contraire acceptez d’être une communauté fragile et poreuse où, hélas, certains claquent la porte et trahissent leur premier attachement. Et où il arrive même au premier responsable de renier le Maître.

Lavés, nourris, instruis de l’axe nouveau de leur vie, conscients de faire partie d’une Église faible et pécheresse, les disciples peuvent ensuite recevoir la lumière de leurs cœurs et de leurs têtes : 3 longs chapitres d’enseignements (14-16) qui les consolent, les mettent en garde contre la haine du monde qui va se déchaîner contre eux. Mais qui aussi les rassurent grâce aux promesses de la venue certaine de l’Esprit-Saint qui les confortera, les instruira, les défendra.

Alors, après qu’il ait lavé, nourri, prévenu, consolidé ses disciples, après qu’il les ait longtemps regardé avec tendresse, Jésus lève les yeux aux ciel et murmure sa grande prière. De pied en cap, les disciples, dans leurs relations horizontales, sont pris dans le grand élan de la prière où le Fils les entraîne vers le Père.

« Je prie non seulement pour ceux qui sont là mais encore pour ceux qui accueilleront leur parole et croiront en moi. Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé. Je leur ai donné la Gloire que tu m’a donnée pour qu’ils soient un comme nous sommes un. Que leur unité soit parfaite : ainsi le monde saura que tu m’as envoyé et que tu les as amés comme tu m’a aimé.

La foi ne fondra pas au rythme des millénaires. La prière du Fils glorieux dynamise la totalité des croyants jusqu’au dernier jour du monde. Je prie mal et trop peu mais le Seigneur prie pour moi, et chacun de nous. Unique intention : l’unité. Pas une bonne entente polie, pas un traité de paix vite bafoué, pas une poignée de mains furtive. Mais UN comme PÈRE et FILS sont UN. Tant que nous n’acceptons pas cette divinisation des relations, la violence l’emportera toujours. Unique but : « que le monde croie ». Car ainsi seulement il sera sauvé du mal et connaîtra la paix.

Père, ceux que tu m’as donné, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi, et qu’ils contemplent ma Gloire, celle que tu m’as donnée parce que tu m’as aimé avant même la création du monde.

Stupeur : le Fils, foyer d’amour du Père, aime follement (divinement) ses disciples, il veut qu’aucun ne se perde, il cherchera toujours la brebis égarée pour qu’elle découvre le Fils divin dans l’homme de chair car « Le Logos était au commencement et tout fut par lui » (1, 2)

Père juste, le monde ne t’a pas connu, mais moi je t’ai connu, et ils ont reconnu, eux aussi, que tu m’as envoyé. Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître encore pour qu’ils aient en eux l’amour dont tu m’as aimé, et que moi aussi je sois en eux ».

Connaître est plus qu’un savoir mais une entrée dans le mystère de l’autre, un accueil délicat dans la lumière infinie, un processus infini. L’amour n’a pas de clôture. Là-dessus Jésus se lève et emmène ses disciples au Cédron. Judas et la troupe vont le rejoindre. L’amour trouve son chemin : la croix.

Fr Raphael Devillers, dominicain.


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