header2

1er dimanche de Carême – Année C – 6 mars 2022

Évangile de Luc 4, 1-13

Les Choix Fondamentaux

1er dimanche de carême - Année C – 27 février 2022 – Évangile de Luc 4, 1-13

Satan ? Diable ?...


Ancien Testament. Le mot hébreu « shatan » désigne l’adversaire, spécialement celui qui exerce au tribunal le rôle d’accusateur. C’est seulement dans les textes plus tardifs que shatan apparaît comme un accusateur surnaturel. 1 Chron 21, 1 est le seul texte où shatan devient le nom propre, sans article, de l’adversaire surnaturel d’Israël.

Littérature postérieure. Shatan est le nom de l’être personnifiant les forces du mal. A Qumran, on parle de « Bélial ». Shatan apparaît parfois comme le chef des anges rebelles.

Nouveau Testament. Il reflète la même conception fondamentale de shatan qui se pose en adversaire de Jésus dès la tentation au désert. L’invocation seule du nom de Jésus suffit à précipiter sa chute (Lc 10, 17).
Le mot est rarement utilisé comme un nom propre, sans l’article (Marc 3, 23). Les évangélistes semblent préférer d’autres termes, jugés équivalents : « le mauvais » (Matt 13, 19), le « diable » (Luc 8, 12). Le seul passage de Jean où on trouve le mot est 13, 27 où il répond à l’emploi de « diable » en 13, 2.

Ces vocables, tout comme « l’ennemi » (Lc 10, 19), « l’antique serpent » (Apoc 12, 9) sont en fait synonymes et désignent la personnification des forces du mal que l’on rend responsables même de maladies (Lc 13, 16) mais qui s’opposent surtout à l’action de Jésus et de ses disciples (Lc 22, 31)

D’après l’article « satan » dans « Dictionnaire encyclopédique de la Bible »

Évangile de Luc 4, 1-13

Les Choix Fondamentaux


Depuis mercredi, nous sommes donc entrés dans la période de carême : à part les anciennes générations, qui sait encore ce que ce mot signifie ? Il évoque la tristesse en commençant par « jour des cendres » et en imposant privations et sacrifices. Quel est donc le sens de tout cela aujourd’hui ?

En fait carême désigne « une quarantaine », mot très employé aujourd’hui suite à l’épidémie du covid, marquant un temps d’observation pour déceler les indices de contamination et échapper au mal. Ainsi le carême est une période de réflexion sur notre manière de vivre notre engagement chrétien : est-ce que nous nous préservons du mal ? Luttons-nous réellement contre les tentations que la société nous inflige ? Nous décidons-nous à rectifier nos dérives ? Vraiment le problème ne se réduit pas à la privation de quelques friandises mais à la réussite de notre VIE ! La question n’est pas : que vais-je faire pour Dieu ? mais qu’est-ce que Dieu veut faire de moi ? Est-ce que j’obéis à sa volonté ?

Jésus a été tenté

Certains accusent encore la foi d’être une aliénation, une obéissance aveugle. Absolument pas. La foi rend libre : assaillie de critiques, sujette à des dévoiements elle appelle sans cesse à des décisions. Pendant des années, Jésus mena l’existence d’un simple charpentier de village, sans rien d’exceptionnel. Puis un jour, comme beaucoup de voisins, il se rendit à l’écoute du nouveau prophète et là ce fut le choc : sortant du baptême, il entendit une voix du ciel : « Tu es mon Fils bien-aimé : aujourd’hui je t’engendre ». Il comprit : Dieu mon Père m’instaure pour inaugurer « aujourd’hui » son Royaume. Mais comment ? Aucun programme, aucune directive. Il lui fallait inventer. La Force, l’Esprit de Dieu ne nous manipule pas mais nous plonge au cœur de notre liberté donc de nos choix.

C’est pourquoi Jésus entra « en carême » : il s’enfonça dans le désert et la solitude totale pour être seul avec Dieu, se contentant de l’eau de puits et de la maigre nourriture de quelques arbustes. Mais le désert n’est pas un temps de loisirs ou de douce piété : le démon y rode, force mystérieuse acharnée à détruire le projet de Dieu et à tuer l’homme. Sa voix fielleuse insinue d’alléchantes propositions.

« S’il est vrai que tu es le Fils de Dieu », tires-en les conséquences : je vais t’indiquer les moyens les plus efficaces pour réaliser ce Royaume.

1ère tentation : Être comblé par le monde

« Change donc ces pierres en pains » : c.à.d. que l’humanité soit comblée par la matière, les biens de ce monde. Qu’elle croit combler son désir de Vie en assouvissant ses besoins. Que son bonheur d’avoir toujours mieux et plus le satisfasse, le remplisse. Jamais assez. Jouir des nourritures terrestres, s’évader dans les alcools et les drogues, planer à la découverte des merveilles de la création, inventer les nouvelles liturgies des concerts et des sports, dans les « temples » gigantesques de la consommation, adorer « les idoles » du chant ou du foot, s’acharner au profit maximum, se trémousser jusqu’à la transe, rêver d’ascension dans le ciel étoilé...L’argent est mon berger : rien ne saurait me manquer.

Sèchement Jésus réplique : « L’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute Parole de Dieu ».

Oui certes, l’homme est un consommateur obligé et rien n’interdit les plaisirs de la table et des divertissements. Mais ce qui lui donne la vraie vie, c’est de jouir des biens de ce monde comme Dieu le demande, c’est d’écouter la voix de son désir profond. Jésus acceptera des invitations partout mais il restera pauvre, il dénoncera avec vigueur la fascination de l’argent qui remplit d’orgueil, détruit la justice, lamine les pauvres. Et il commandera à ses disciples de régler leur existence autour du simple repas où, toutes nations et toutes classes sociales mêlées, ils mangeront un morceau du même pain. Ainsi seront-ils libérés de l’idolâtrie et deviendront un seul Corps.

2ème tentation : La violence du pouvoir

« Vois le monde : Je te donnerai tout le pouvoir sur ces royaumes car cela m’appartient et je le donne à qui je veux ... Si tu te prosternes devant moi ! ».

Après l’avoir, la soif du Pouvoir. Pharaonique chez certains ! A tous les stades, les hommes ont besoin d’organisation, de hiérarchie de pouvoirs afin de maintenir l’ordre. Mais ce démon assure qu’il est le maître de la politique et qu’il assure le succès de ceux qui cèdent à ses directives : ambition démesurée, perte des scrupules, acharnement à écraser l’autre, à gravir les échelons, à comploter en toute perversité, à imposer ses ordres, à utiliser les ruses et les violences nécessaires. Terrifiante ivresse du Pouvoir ! Le monde a-t-il connu un seul jour sans guerre ?

Horrifié, Jésus rejette vivement cette idolâtrie meurtrière : « « Tu te prosterneras devant le Seigneur ton Dieu et c’est lui seul que tu adoreras ».

Dieu ne s’impose pas, il respecte notre liberté. Son projet est de nous sauver du mal qui fait notre malheur, de nous faire entrer dans son Royaume de justice, de joie, de paix mais c’est à chacun de choisir son chemin. Pactiser avec le démon en cédant à ses sollicitations, en prétendant vouloir le bonheur des foules, est un leurre, un mensonge, une chute dans l’abîme. Les idéologies modernes n’ont-elles pas conduit aux pires des massacres, au goulag, à la shoah ???? Jésus refusera l’usage de toute violence, il parlera, expliquera, ne forcera personne, invitera chacun à découvrir son Père. Victime de la violence des puissants, c’est en se donnant par amour qu’il deviendra effectivement Roi.

3ème Tentation : La Séduction

« Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi du haut du temple puisqu’il est écrit que Dieu ordonnera à ses anges de te garder ».

Il n’y a pas que la violence physique : plus subtilement il existe une façon de subjuguer les foules : les ravir par le merveilleux, les séduire par l’inimaginable. Planer sans nulle protection et atterrir indemne sur l’esplanade du temple où s’agglomèrent les foules, voilà un spectacle qui va éliminer toutes les objections et les y faire entrer en proclamant qu’elles croient. Les gens doutent mais il suffit que l’on parle d’un miracle, d’un fait inexplicable, et ils courent. Ils voudraient une religion du pouvoir, qui protège de toute chute, qui permet des exploits, qui guérit sur commande. Enfantillage !

L’homme ne peut sommer Dieu d’accomplir une intervention ; il ne peut pas solliciter sa Toute-Puissance dans un but spectaculaire et magique ! Une dernière fois, Jésus repousse la tentation faussement religieuse. Lui-même certes a accompli quelques miracles (une trentaine selon les évangiles) mais jamais pour épater et forcer l’adhésion. Ce n’était jamais des gestes ostentatoires pour se mettre en valeur mais des actes inspirés par la miséricorde devant la souffrance des hommes. Lorsque des pharisiens lui proposèrent de faire sur le champ un miracle afin qu’il puissent croire, il se rebiffera tout de suite. Et d’ailleurs on remarque ses réticences croissantes devant le merveilleux et il cessera d’en faire jusqu’à refuser de descendre de la croix.

Rendez-vous au Golgotha

« Ayant épuisé toutes les formes de tentation, le démon s’éloigna de Jésus...jusqu’au moment fixé ! ».

Ainsi ces trois tentations résument toutes les autres : combler l’homme par des biens uniquement terrestres, imposer la foi par l’usage de la violence, l’insinuer par des moyens magiques. On ne supprime pas Dieu et on ne l’utilise pas à son service. Ainsi, lors de son « carême » au désert, Jésus a pris ses options fondamentales.

Il va commencer sa mission avec une seule arme : la Parole ; avec un seul moyen : la pauvreté ; une méthode : la fidélité à l’humble condition humaine. Vrai Fils de Dieu, il va demeurer faible, humble. Il ne se servira pas de Dieu pour réaliser sa mission mais il sera son serviteur.

Sans titre de gloire, sans nulle pression, sans flatterie, il ira par les chemins, il choisira comme collaborateurs des hommes ordinaires dont il supportera la faiblesse. Mais rien ni personne ne l’arrêtera, il ne fera aucune concession, il affrontera le bloc de ses adversaires sans jamais faillir. Il sera encore tenté même par des gens très pieux, même par Pierre qu’il repoussera comme un « satan ». Consciemment il marchera au rendez-vous final, « au moment fixé » , où le Satan déchaînera toute sa force pour le jeter dans la fournaise de la haine. Mais le feu de son amour en sera exacerbé et la croix mortelle deviendra son trône. Nu et pitoyable, il ne sera pas anéanti mais victorieux. « Père, pardonne-leur » : le Royaume sera inauguré.

Notre Carême

Le carême est donc un temps de combat. Un temps de réflexion pour débusquer les idéologies courantes mais mortifères. Pour chercher de tout cœur à mieux connaître la volonté de Dieu en relisant les Écritures. Pour rejeter les propositions enjôleuses qui promettent le bonheur et mènent à la mort. Pour constituer des communautés d’entraide. Pour nous préparer à vivre le mystère de Pâques.

Fr Raphael Devillers, dominicain.
L’Église doit changer

L’Église doit changer

Par le Cardinal Claude HOLLERICH



64 ans, jésuite - professeur au Japon pendant 20 ans - en 2011 Archevêque du Luxembourg – Président de la commission des épiscopats de l’Union Européenne ; cardinal en 2019 ; nommé secrétaire général du prochain Synode – Homme de confiance du pape François.


  • L’Europe est-celle redevenue terre de mission ?
Oui. Elle l’est depuis longtemps. Dans ma jeunesse, le Luxembourg ressemblait un peu à l’Irlande, avec de grandes processions, une forte piété populaire...Après réflexion, je vois bien que ce passé n’était pas si glorieux...Il y avait déjà à l’époque beaucoup de fissures et d’hypocrisie. Au fond les gens ne croyaient pas plus qu’aujourd’hui, même s’ils allaient à l’église. Ils avaient une sorte de pratique dominicale culturelle, mais sans que cela soit inspiré par la mort et la résurrection de Jésus.
  • Cette pratique culturelle est-elle terminée ?
Pas encore tout à fait...Mais je suis convaincu que le covid va accélérer le processus. Au Luxembourg nous avons un tiers de pratiquants en moins. Je suis sûr qu’ils ne vont pas revenir....Pour beaucoup, se dire catholique est encore une sorte de déguisement doté d’une morale générale. Cela contribue selon eux à être « de bons chrétiens », mais sans vraiment définir ce que cela veut dire. Mais cette époque doit finir. Nous devons maintenant bâtir une Église sur la foi. Nous serons une minorité...
  • En quoi le message du christianisme est-il toujours pertinent aujourd’hui ?
Parce que l’homme n’a pas changé depuis 2000 ans. Il est toujours en quête du bonheur et ne le trouve pas. Il est toujours assoiffé d’infini et se heurte à ses propres limites. Il commet des injustices qui ont des conséquences graves pour d’autres personnes, ce que nous appelons le péché. Mais nous vivons maintenant dans une culture qui a tendance à refouler ce qui est humain. Cette culture du consumérisme promet de combler les désirs de l’homme mais elle n’y parvient pas. Pourtant, dans des moments de crise, de choc, les hommes se rendent bien compte que tout un tas de questions dorment au fond de leur cœur.

Le message de l’Évangile est d’une fraîcheur exceptionnelle pour répondre à cette recherche de sens et de bonheur. Le message est toujours pertinent, mais les messagers apparaissent parfois dans des costumes des temps passés...

C’est pourquoi nous devons nous adapter. Non pas pour changer le message lui-même évidemment, mais pour que celui-ci puissent être compris...Le monde est toujours à la recherche mais ne cherche plus de notre côté, et cela fait mal ! Nous devons présenter le message de l’Évangile de telle manière que les gens puissent s’orienter vers le Christ...
  • C’est pour cela que le pape a lancé un Synode sur la synodalité.
...Aujourd’hui on ne peut plus se contenter de donner des ordres du haut vers le bas. Dans toutes les sociétés, en politique, dans les entreprises, ce qui compte désormais est la mise en réseau. Ce changement des modes de décision va de pair avec un véritable changement de civilisation, auquel nous faisons face. Et l’Église, comme elle l’a toujours fait tout au long de son histoire, doit s’y adapter.

La différence est que cette fois, le changement de civilisation a une force inédite. Nous avons une théologie que plus personne ne comprendra dans 20 ou 30 ans. Cette civilisation aura passé. C’est pourquoi il nous faut un nouveau langage qui doit être fondé sur l’Évangile.

Or toute l’Église doit participer à la mise au point de ce langage : c’est le sens du Synode.

Extraits de l’interview paru dans « La Croix » du samedi 23 01 22

Besoins du monde et Désir de Dieu


La créature ne dépend pas de Dieu
à la façon dont elle dépend du pain dont elle se nourrit.
Elle n’en a pas besoin ...car elle est séparée de Lui sur un tout autre mode
que celui qui fait tendre, de façon vitale, vers ce dont on manque.
Elle ne dépend pas de Lui non plus
à la façon dont l’enfant dépend de l’adulte
qui le nourrit, le console et le protège.
Pourtant il arrive que cette créature pense à Dieu,
qu’elle aspire à Lui et désire Le connaître ...

Catherine CHALIER (« Désir et appel »- étude sur E. Lévinas)
Cliquez-ici

Abonnement gratuit sur simple demande adressée à r.devillers@resurgences.be

Merci de préciser vos nom, prénom, ville, pays et engagement éventuel en Église.

Toutes les homélies sont toujours visibles à l'adresse :

https://resurgences.be

Email Marketing Powered by MailPoet