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26ème dimanche – Année B – 26 septembre 2021

Évangile de Marc 9, 38-48

Pas du Sucre : du Sel

26ème dimanche - Année B – 26 septembre 2021 – Évangile de Marc 9, 38-48

« Ne pas réduire la foi au sucre qui adoucit la vie »

Pape François

« ...En marchant, vous surmontez la tentation d’une foi statique qui se contente de quelques rites ou de vieilles traditions. Au contraire, vous sortez de vous-mêmes, vous portez dans vos sacs les joies et peines, et vous faites de la vie un pèlerinage d’amour vers Dieu et vers les frères ...

... N’oublions pas ceci : on ne peut pas réduire la foi au sucre qui adoucit la vie.
Jésus est un signe de contradiction. Il est venu apporter la lumière là où il y a les ténèbres, en faisant sortir les ténèbres à découvert et les contraignant à se rendre. (…)

Devant Jésus, on ne peut rester tiède et “jouer sur les deux tableaux”. L’accueillir signifie accepter qu’il dévoile mes contradictions, mes idoles, les suggestions du mal ; et qu’il devienne pour moi la résurrection, celui qui toujours me relève, qui me prend par la main et me fait recommencer.

Il ne s’agit pas d’être hostiles au monde, mais d’être des “signes de contradiction” dans le monde. Des chrétiens qui sachent montrer, par leur vie, la beauté de l’Évangile, qui soient des tisseurs de dialogue là où les positions se durcissent ».

Sanctuaire national de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs,
Šaštin, Slovaquie (15.9.21)

Évangile de Marc 9, 38-48

Pas du Sucre : du Sel


Tout au long de sa montée à Jérusalem, Jésus travaille à donner un enseignement nouveau à ses apôtres qui le suivent sans comprendre. Il est capital en effet de donner une formation à ceux qui seront responsables de constituer les futures communautés. A la première étape, en repassant par Capharnaüm, Jésus a d’abord balayé leur vanité et leur rivalité pour occuper les meilleurs places. : nous l’avons entendu dimanche passé. L’évangile d’aujourd’hui donne la suite de cette instruction.

Pas de Monopole du Bien


Jean, l’un des Douze, dit à Jésus : « Maître nous avons vu quelqu’un chasser des esprits mauvais en ton nom : nous avons voulu l’en empêcher car il n’est pas de ceux qui nous suivent ». Jésus répond : « Ne l’empêchez pas, car celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, sitôt après, mal parler de moi. Celui qui n’est pas contre nous est pour nous. Et celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vous le dis, il ne restera pas sans récompense ».


Si Simon-Pierre est l’impétueux, sinon le téméraire, Jean, lui, a un caractère bouillonnant. Quand il avait choisi les Douze, Jésus a appelé les fils de Zébédée, Jacques et Jean, « boanerguès », « fils du tonnerre » (3, 17). D’autre part Luc raconte que, lorsqu’un village samaritain avait refusé de les recevoir, Jean n’avait rien proposé de mieux à Jésus que de déchaîner le feu du ciel pour les consumer. Jésus lui avait vertement reproché sa violence.(9, 54).

Il est plaisant de constater que Jésus d’abord, puis les auteurs des évangiles, ne cachent pas les défauts de caractère des apôtres. Ils n’en font pas des saintes-nitouches impeccables qui nous écraseraient par leur perfection. Heureuse consolation.

Ici Jean est à nouveau excédé parce qu’un exorciste juif opère en invoquant le nom de Jésus alors qu’il ne fait pas partie des disciples qui marchent derrière Jésus. Jésus rejette cet exclusivisme. Des personnes non chrétiennes sont capables de faire beaucoup de bien et même de rendre service à des chrétiens sans adhérer à leur foi. Il faut s’en réjouir. Lors des inondations récentes, on a vu des multitudes se précipiter pour venir au secours des sinistrés et personne ne se demandait qui allait ou non à la messe. Le flux de la charité déborde les balises de la profession de foi.

Danger du Scandale


« Celui qui scandalisera un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait qu’on lui attache une grosse meule autour du cou et qu’on le jette à la mer.
Si ta main t’entraîne au péché, coupe-la : il vaut mieux entrer manchot dans la Vie éternelle que d’être jeté avec tes deux mains dans la géhenne.
Si ton pied t’entraîne au péché, coupe-le. Il vaut mieux entrer estropié dans la Vie éternelle que d’être jeté avec tes deux pieds dans la géhenne.
Si ton œil t’entraîne au péché, arrache-le. Il vaut mieux entrer borgne dans le Royaume de Dieu que d’être jeté avec tes deux yeux dans la géhenne.


La répétition et l’insistance montrent qu’il s’agit d’un point très grave. Quel est le danger sous-jacent ?

Les responsables sont chargés de la lourde mission de proclamer l’évangile, de l’expliquer, d’entretenir la charité de la communauté, de guider la prière, de rectifier les dérives, etc. Mais qu’ils prennent garde car eux-mêmes vont également être tentés, et parfois de façon plus subtile, plus incisive.

Leur témoignage premier est celui de leur comportement qui est le premier modèle pour tous les disciples. Si un responsable défaille, s’il se laisse entraîner au péché, il va devenir pour ses frères « un scandale » : ce mot désigne une pierre qui fait saillie sur le chemin et sur laquelle on trébuche. Évidemment Jésus emploie le langage imagé des rabbins : ce ne sont pas les organes corporels eux-mêmes qui sont fautifs et il n’est pas question d’une amputation réelle d’un membre (ce que l’Église n’a jamais prôné).

Mais cette triple et sévère répétition veut faire comprendre l’importance capitale de l’enjeu : c’est le but final de la vie qui est en question. La marche fidèle derrière Jésus donne la Vie éternelle, fait entrer dans le Royaume de Dieu. Au contraire faire chuter les fidèles – qui sont toujours comme des enfants à la foi fragile – est un péché qui condamne à la « géhenne ». Que signifie ce mot ?

A la sortie sud-est de la vieille ville de Jérusalem, il y avait une vallée qui avait été jadis la propriété d’un certain Hinnôn et qu’on appela « terre d’Hinnôn » (gè-henne). Or il arriva qu’on en fit un lieu de culte des idoles avec notamment le sacrifice d’enfants au moloch. Horreur suprême, « lieu de la tuerie », dira Jérémie (7, 32). Irrémédiablement profané, le lieu devint celui de la décharge de la ville : sous le soleil brûlant, on y voyait les détritus se consumant en permanence en dégageant une odeur pestilentielle (Is 66, 24). La géhenne devint le nom de la condamnation éternelle, l’enfer. Le symbole, hélas, devint portrait de la réalité (« L’enfer » de Dante...). La question demeure : Comment conjuguer la menace de la condamnation et la promesse de la certitude du pardon (signée par le don de la vie du Seigneur sur la croix sanglante) ?

Devant cet avertissement terrible, comment ne pas penser aux « scandales » des abus sexuels qui viennent de bouleverser l’Église. Avec le pape François, nous supplions pour les victimes qui ont tant souffert et nous prions pour que les responsables, saisis de repentir, s’en remettent quand même à l’infinie miséricorde de Dieu. Et nous renouvelons nos prières à l’intention de tous les responsables d’Église afin qu’ils ne tardent jamais à « trancher » le plus vite possible dans les tentations qui les assaillent.

La lecture liturgique s’arrête ici mais pourtant l’enseignement de Jésus se prolonge par une ultime remarque, au sens difficile – ce qui explique son omission – mais qui clôture très bien l’ensemble.

Le Sel de la Paix


Car chacun sera salé par le feu. C’est une bonne chose que le sel mais si le sel perd son goût, avec quoi le lui rendrez-vous ? Ayez du sel en vous-mêmes et soyez en paix les uns avec les autres.


Tous les exégètes avouent leur perplexité devant cette finale. On peut supposer ceci : tout disciple sera nécessairement soumis à des épreuves. Ce combat nécessaire comportera certes des risques de chute mais pourra éveiller la force de résistance, remplir de forces nouvelles, renforcer la foi. Aguerrie, consolidée par la lutte, la foi sera plus forte. Au lieu d’être tiède et insipide donc inefficace, elle deviendra comme le sel dans les aliments : elle donnera sens à la vie.

En même temps, les vrais disciples entraînés par les épreuves se rejoindront dans la solidarité, apprendront à se serrer les coudes, comprendront que les disputes sont absurdes, qu’elles les fragilisent. Le combat contre les tentations les poussera à se rapprocher les uns des autres et à vivre dans la paix.

Conclusion : De la Querelle à la Paix

Lu en ces deux dimanches, l’enseignement de Jésus à ses apôtres dans la maison de Capharnaüm est bref mais demeure valable pour tous les responsables chargés de guider leur frères (et les autres)

Tout a commencé par une querelle entre ces hommes qui se disputaient pour obtenir les premières places dans le Royaume dont ils rêvaient – et alors même que Jésus, pour la deuxième fois, leur avait annoncé sa passion prochaine et la conséquence de « prendre sa croix ».

Jésus leur répondit de chercher plutôt la dernière place, celle du serviteur de tous les autres. Et, initiative toute neuve, il plaça un enfant au milieu d’eux en les pressant de l’accueillir. Alors ils seraient sûrs que Jésus est au milieu d’eux.

Ensuite on aborda les relations avec les autres, étrangers à la foi. Les disciples doivent être contents de leur voir faire du bien, sans concurrence, et même ils doivent être reconnaissants de bénéficier de leurs services.

Au lieu de se méfier des autres, qu’ils se méfient d’abord d’eux-mêmes. Les tentations les pousseront à faire le mal, donc à scandaliser leurs frères jusqu’à leur faire perdre la foi. Il faut savoir trancher dans le vif pour écarter le danger dès qu’il menace.

Ce combat contre les tentations sera dur mais il pourra raffermir leur foi. Ils éviteront la fadeur d’une religiosité évaporée, seront sel de l’existence et ils se soutiendront mutuellement dans la paix.

Et c’est ainsi qu’ils cesseront de se quereller (bêtement) pour vivre en paix (joyeusement).

Merveille de l’Évangile qui, sans bavardage, en des mots très simples, met toujours le doigt sur l’essentiel.

Et je termine comme le pape François : « S’il vous plaît, priez pour moi ».

Fr. Raphaël Devillers, dominicain.
L’Église n’est pas une forteresse, un château
Château de Bratislava, capitale de la Slovaquie

L’Église n’est pas une forteresse, un château

Pape François

Cathédrale de Bratislava – 13 09 2021 – 1ère partie



C’est bien à toutes les Églises d’Europe que le Pape lance cet important appel à la recherche du changement, à la lutte contre la sclérose, à l’audace.

... L’Église n’est pas une forteresse, elle n’est pas une puissance, un château situé en hauteur qui regarderait le monde avec distance et suffisance. Ici, à Bratislava, le château est déjà là, et il est très beau !

Mais l’Église c’est la communauté qui désire attirer au Christ par la joie de l’Évangile, le levain qui fait fermenter le Royaume de l’amour et de la paix dans la pâte du monde. S’il vous plaît, ne cédons pas à la tentation de la magnificence, de la grandeur mondaine ! L’Église doit être humble comme l’était Jésus qui s’est dépouillé de tout, qui s’est fait pauvre pour nous enrichir (cf. 2 Co 8, 9) : c’est ainsi qu’il est venu habiter parmi nous et guérir notre humanité blessée.

Le centre de l’Église n’est pas elle-même. Sortons de l’inquiétude excessive pour nous-mêmes, pour nos structures, pour la façon dont la société sympathise avec nous. Et à la fin, cela nous conduira à une “théologie du maquillage”…Plongeons-nous plutôt dans la vie réelle des gens et demandons-nous : quels sont les besoins et les attentes spirituels de notre peuple ? Qu’attend-on de l’Église ? Il me semble important d’essayer de répondre à ces questions et je pense à trois mots.

LIBERTÉ

Sans liberté, il n’y a pas de véritable humanité, parce que l’être humain a été créé libre et pour être libre. Les périodes dramatiques de l’histoire de votre pays sont un grand enseignement : lorsque la liberté a été blessée, violée et éliminée, l’humanité a été dégradée et les tempêtes de la violence, de la coercition et de la privation des droits se sont déchaînées.

Mais en même temps, la liberté n’est pas une conquête automatique qui demeure une fois pour toutes. Non ! La liberté est toujours un chemin, parfois pénible, à renouveler continuellement, il faut lutter chaque jour pour elle. Il ne suffit pas d’être libre extérieurement, ou à travers les structures de la société, pour l’être vraiment. La liberté appelle directement à la responsabilité des choix, à discerner, à faire avancer les processus de la vie. Et cela est difficile, ça nous fait peur.

Il est parfois plus commode de ne pas se laisser provoquer par les situations concrètes et de continuer à répéter le passé, sans y mettre le cœur, sans le risque du choix : mieux vaudrait passer sa vie en faisant ce que d’autres – peut-être la masse ou l’opinion publique ou les choses que les médias nous vendent– décident pour nous. Ça ne va pas. Et aujourd’hui, nous faisons plusieurs fois les choses que les médias décident pour nous. Et on perd la liberté.

Hier, en parlant au groupe œcuménique, je rappelais Dostoïevski avec “Le grand inquisiteur”. Le Christ revient sur terre en cachette et l’inquisiteur le réprimande pour avoir donné la liberté aux hommes. Un peu de pain et un petit quelque chose suffit ...Parfois, même dans l’Église, cette idée peut faire son chemin : mieux vaudrait avoir toutes les choses prédéfinies, des lois à observer, la sécurité et l’uniformité, plutôt que d’être des chrétiens responsables et adultes qui pensent, interrogent leur conscience et se remettent en cause. C’est le début de la casuistique, tout réglementé...

Dans la vie spirituelle et ecclésiale, la tentation existe de chercher une fausse paix qui nous laisse tranquille, plutôt que le feu de l’Évangile qui nous inquiète, qui nous transforme. Mais une Église qui ne laisse pas de place à l’aventure de la liberté, même dans la vie spirituelle, risque de devenir un lieu rigide et fermé.

Certains sont peut-être habitués à cela ; mais bien d’autres – surtout parmi les nouvelles générations – ne sont pas attirés par une proposition de foi qui ne leur laisse pas de liberté intérieure, ils ne sont pas attirés par une Église où il faut penser tous de la même manière et obéir aveuglement. (à suivre)

Pape François
26eme-dimanche-2021-3
Après l’empaquetage du Pont Neuf, puis du Reichstag,
voici celui de l’Arc de Triomphe.
L’artiste pressentait-il que l’Europe doit déménager ?
D’autant qu’il s’appelait Christo.
La charité est au-dessus de toutes les règles...
C’est une grande dame : il faut faire ce qu’elle commande.
Employons-nous avec un nouvel amour
à servir les pauvres,
et cherchons même les plus pauvres.
Reconnaissons devant Dieu
que ce sont nos seigneurs et nos maîtres,
et que nous sommes indignes de leur rendre nos petits services.

Saint Vincent de Paul aux Filles de la Charité
- Fête ce 27 septembre -
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