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12ème dimanche – Année B – 20 juin 2021

Évangile de Marc 4, 35 - 41

Vous n’avez pas encore de foi ?

12ème dimanche - Année B – 20 juin 2021 – Évangile de Marc 4, 35 - 41
L’évangile de ce dimanche – « La tempête apaisée » - rappelle immédiatement le moment exceptionnel du vendredi 27 mars 2020, lorsque le Pape François, claudiquant et fragile, seul devant l’immense place Saint Pierre battue par le vent et la pluie, et vide de tout public suite au confinement, proclamait son homélie comme un appel pathétique :

« ... D’épaisses ténèbres couvrent nos places, elles se sont emparées de nos vies, nous nous retrouvons apeurés et perdus. Comme les disciples de l’évangile, nous avons été pris au dépourvu par une tempête inattendue et furieuse...Nous nous trouvons dans la même barque, tous fragiles et désorientés mais en même temps tous importants et nécessaires, tous appelés à ramer ensemble.

...Seigneur, ce soir, ta Parole nous touche et nous concerne tous. Dans notre monde, que tu aimes plus que nous, nous sommes allés de l’avant à toute vitesse, en nous sentant forts et capables dans tous les domaines. Avides de gains, nous nous sommes laissé absorber par les choses et étourdir par la hâte ...Maintenant, nous t’implorons : « Réveille-toi, Seigneur ! »...

« Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? ». Tu nous adresses un appel, un appel à la foi qui ne consiste pas tant à croire que tu existes, mais à aller vers toi et à se fier à toi...
Ce n’est pas le temps de ton jugement mais celui de notre jugement : le temps de choisir ce qui importe...le temps de réorienter la route de la vie vers toi, Seigneur, et vers les autres.... Le début de la foi, c’est de savoir qu’on a besoin de salut ...

Chers frères et sœurs, que de cette colonnade qui embrasse Rome et le monde, descende sur vous, comme une étreinte consolante, la bénédiction de Dieu »

Évangile de Marc 4, 35 - 41

Vous n’avez pas encore de foi ?

Dès ses premières lignes, Marc avait pointé la mission essentielle de ce Jésus inconnu venu à l’improviste et circulant à travers les villages au bord du lac de Galilée : PROCLAMER.

« Il proclamait : Le temps est accompli et le Règne de Dieu s’est approché ! Convertissez-vous et croyez à l’évangile » (1, 15).


Déclaration fondamentale qui doit tester nos prières, nos attitudes, notre travail paroissial. Dieu va accomplir sa promesse, l’événement le plus important de l’histoire du monde va se réaliser : Dieu va remplacer le règne des idoles, de la violence, du mensonge, de la cupidité par son Règne de paix. Ne guettez pas une intervention fulgurante : librement changez de mentalité et de comportement. Si vous croyez, si vous faites confiance, si vous acceptez, vous entrez dans la Bonne Nouvelle. Le petit livre de Marc ne sera plus une vie de Jésus mais Évangile, LA Bonne Nouvelle de la réussite de votre existence.

Ensuite Jésus ENSEIGNE ce qu’est le Règne de Dieu. Celui-ci est mystérieux, il bouleverse nos conceptions, n’occupe pas de territoire, ne bouleverse pas l’organisation du monde. Réalité vivante il ne peut se définir de façon abstraite mais être évoqué en images : c’est pourquoi Jésus use de paraboles qui ne sont certainement pas des illustrations à l’usage des enfants mais un véritable « enseignement » qu’il importe d’ «écouter » avec la plus grande attention. Elles incitent à se rapprocher de Jésus afin de le questionner et d’en recevoir la richesse de signification. La liturgie nous a rapporté les deux dernières d’une série de 5 (Mc 4, 1-34).

Mais Jésus ne se contente pas de parler : il AGIT. Paroles et actions sont liées au point que Marc enchaîne immédiatement : « Ce jour-là, le soir venu, Jésus dit aux disciples ... ». La journée des paraboles est suivie du récit de 4 actes de puissance de Jésus : en traversant le lac, il calme la tempête ; chez les païens, il guérit un démoniaque : de retour il sauve une femme puis une fillette.

La Parole montre que l’Évangile est une proposition qui respecte la liberté : l’homme peut acquiescer, refuser, renier, revenir. L’Action prouve que le Règne de Dieu n’est pas une idéologie, une idée religieuse ou morale, une conception évanescente, une promesse aléatoire. Sans action, l’évangile pourrait être une aliénation religieuse ; sans Parole une œuvre de bienfaisance humanitaire.

La Tempête Apaisée

Après une journée harassante d’enseignement et de débats avec la foule et ses disciples, Jésus pourrait profiter d’une nuit de repos : au contraire, sans plus attendre, comme si la tâche pressait, il décide de gagner la rive orientale du lac qui se situe en territoire de Décapole, donc en terre païenne. « Passons sur l’autre rive ». Car la Bonne Nouvelle, si elle est née en Israël doit traverser les frontières, et toujours « passer ». On sait l’importance du thème de la « pâque » qui signifie « passage ».

Obéissants, les disciples - dont plusieurs sont des pêcheurs du lac – tirent l’embarcation. Voyant cela, certains auditeurs des paraboles à leur tour les suivent dans d’autres barques, mais Marc n’en parlera plus.

Tout à coup, en pleine nuit, survient un phénomène assez fréquent sur le lac de Galilée : il est secoué par des vents contraires, les vagues enflent, les souffles tourbillonnent, la tempête grossit et menace. Le naufrage est possible.

« Survient un grand tourbillon de vent. Les vagues se jetaient sur la barque, au point que déjà la barque se remplissait. Et Jésus, lui, à l’arrière, sur le coussin, dormait. Ils le réveillent : « Maître, cela ne te fait rien que nous périssions ? Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : « Silence ! Tais-toi ». Le vent tomba et il se fit un grand calme.
Jésus leur dit : « Pourquoi avez-vous si peur ? Vous n’avez pas encore de foi ? ». ils furent saisis d’une grande crainte et ils se disaient entre eux : « Qui donc est-il pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »


Si votre ado vous affirme qu’il ne croit pas à cette histoire, que c’est une légende inventée par ses disciples, que répondrez-vous ? Vous assurerez que vous y croyez parce que c’est écrit dans l’évangile, parce que l’Église transmet ce texte depuis des siècles. Et si ces arguments restent sans valeur pour votre jeune et qu’il se braque dans son incrédulité, qui l’emportera ? Chacun risque de camper sur sa position.

Et remarquez que Marc n’a pas fait beaucoup d’efforts pour convaincre ses lecteurs de la véracité du fait. Comme s’il savait que toute insistance est superflue : le fait a eu lieu il y a si longtemps, les témoins ont disparu, il n’y a pas de preuve péremptoire. Comment persuader ?

Qu’est-ce que la vérité du récit ?

Relisons le texte avec attention et surtout n’oublions pas à quelle date il a été écrit. Les spécialistes datent l’évangile de Marc vers les années 70 à Rome où les chrétiens sont en proie à la persécution et où certains s’interrogent sur leur foi et leur persévérance.

Par les paraboles, Marc leur rappelle que le Royaume de Dieu vient par la Parole de Jésus qui est comme une semence lancée au cœur de leur être : elle peut disparaître, ne pas germer faute de soin, être étouffée par les soucis mondains. Mais si le cœur est bon, elle poursuit sa croissance secrète, sa fragilité est promise à un développement certain, comme le grain de sénevé devient un arbuste, comme le gland devient un chêne.

Ensuite Marc, dans sa façon de raconter la tempête apaisée, veut montrer sa signification prophétique : elle était déjà signe du « passage » de Jésus.

Car il ne voulait pas changer sa religion mais la libérer de certaines prescriptions qui l’enfermaient comme dans un carcan inadmissible aux païens. Les autorités y ont vu une attaque contre la Loi et l’ont considéré comme un perturbateur, un blasphémateur. La tempête des reproches, des critiques, du mépris, de la haine s’est levée et l’ont entraîné à l’arrestation, la condamnation et la mort.

Écrasés, abasourdis, emportés par l’ouragan, les disciples ont eu l’impression d’être engloutis par le naufrage, de couler dans l’abîme. Le Maître avait disparu, il se taisait, ne disait plus rien. Le dernier mot était à la mort.

Mais non, Jésus était vivant, il était le maître des éléments, son Père pouvait le « réveiller », le remettre debout de sorte qu’il pouvait sauver ses disciples de la panique, du désespoir, de l’incrédulité. Alors, en retrouvant Jésus, ils devaient s’interroger : « Pourquoi avons-nous été terrorisés ? pourquoi n’avions-nous pas la foi ? ». Et finalement se poser la question : « Mais qui donc est cet homme appelé Jésus, que nous écoutions comme un maître, que nous suivions comme un sage ? ». Dorénavant nous ne pouvons plus nous arrêter à cette conception, nous devons poursuivre notre recherche : « Qui donc est-il ? »

Finalement la question n’est pas : « Jésus a-t-il ou non calmé la tempête ? » mais « Qui est Jésus qui nous libère de la peur, qui pardonne nos faiblesses, qui nous permet de traverser toutes les épreuves et même d’affronter la mort ?». Tous les évangiles sont animés par l’interrogation fondamentale : quelle est l’identité profonde de Jésus ? Marc répondait dès sa première phrase.

Ce récit nous interpelle également sur notre mission. Pourquoi est-il si urgent de « passer sur l’autre rive », de quitter notre installation tranquille, notre ronron habituel afin de rejoindre la périphérie, comme répète notre pape ? Pourquoi cette entreprise est-elle bousculante, chahutée, dangereuse même ? Pourquoi la nuit, les ténèbres, les vents contraires, les éléments déchaînés ? Pourquoi tout se ligue-t-il pour nous décourager et nous faire renoncer ?

Et pourquoi Jésus dort-il au milieu d’une telle agitation ? (idem dans les récits parallèles de Matt 8, 24 et Luc 8, 23). N’est-ce pas la question angoissée que les lecteurs de Marc se posaient ? Ils étaient heureux de s’être convertis, ils expérimentaient le bonheur de croire, ils ne faisaient de tort à personne, rendaient service, aidaient les pauvres et les malades...et voilà que le Pouvoir se déchaînait contre eux, les arrêtait, les jetait en prison, parfois les condamnait aux pires supplices ! Pourtant ils priaient, se lamentaient, poussaient des cris vers le ciel...Et pas de réponse. Jésus se taisait. Comme s’il dormait...Comme s’il n’existait pas !! Du coup, la foi de certains faisait naufrage.

La réponse de Jésus : « Pourquoi avez-vous si peur ? Vous n’avez pas encore de foi » nous presse de nous interroger sur nos affirmations parfois bien superficielles sinon enfantines : « Moi, je crois. Je suis un croyant ».

L’épreuve nous oblige à jeter par-dessus bord nos enfantillages.

« A la faveur de la tempête est tombé le maquillage des stéréotypes avec lequel nous cachions nos égo toujours préoccupés de leur image. Reste manifeste, une fois encore, cette appartenance commune à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire : le fait d’être frères » (Pape François – suite de la citation supra).

Fr. Raphaël Devillers, dominicain.
Consulter largement les Laïcs
Paule ZELLITCH , Présidente de la Conférence catholique des baptisé(e))s francophones

Consulter largement les Laïcs

« ...A l’origine, le mot synode vient de « sun » (ensemble)– ce qui veut dire que toutes les voix, toutes les sensibilités doivent être entendues- et odos (chemin) – ce qui implique qu’aucune décision ne surplombe la route. Il faut pouvoir avancer sans questions taboues, en mettant tout sur la table pour discerner. Cela nécessite de ne pas rester tout le temps dans l’entre-soi, avec les mêmes personnes notamment aux postes décisionnaires. Cela n’obère en aucune façon la responsabilité et la charge des évêques, c’est une autre manière de faire Église.

Il y a un problème lié à ce qu’est en train de devenir l’Église de France : seuls 34 % des baptisés se disent aujourd’hui catholiques, et cela ne dit rien de leur attachement à l’institution. Parmi eux 2 % sont pratiquants. Quand on parle de consulter les catholiques, de qui parle-t-on ? On ne peut pas imaginer que l’Église aille de l’avant en ne consultant que ces 2 %.

Elle doit se donner les moyens d’aller au-delà. Et, pour cela, il faut revenir, en faisant le deuil de la fixité, à des choses simples, avec l’introduction de l’altérité, et avec elle la diversité des positions, des paroles, des états de vie dans l’institution. C’est un retour à l’Évangile magnifique à tenir.

... Jusqu’à présent, beaucoup de bonnes volontés, parmi les baptisés, ont été découragées car seules les tâches administratives ou caritatives leur étaient assignées. Or de nombreux catholiques sont capables et prêts à se retrousser les manches pour des initiatives de transformation ecclésiale, dans lesquelles leur voix aurait de l’importance.

Il faut donc que les laïcs de toutes sensibilités, qui représentent 99 % de la tribu, soient impliqués dans le fonctionnement de l’Église, de haut en bas. Qu’ils soient consultés partout. ...

Journal La Croix 21 05 2021 – extraits

Foi et Religion dans une société moderne

Foi et Religion dans une société moderne

Mgr De Kesel, archevêque de Bruxelles



L’Eglise semble traverser une longue crise. Comment décririez-vous l’état du christianisme en Belgique ? Est-il en train de disparaître ?

Non je suis absolument convaincu que ce n’est pas le cas. Il s’agit de bien comprendre la crise et l’épreuve que les catholiques traversent. A la suite de la modernité, qui commence pour moi le 24 octobre 1648 avec la Paix de Westphalie qui institue la tolérance religieuse, le christianisme a perdu son statut de religion culturelle.

Certains voient dans la perte de ce statut, puis dans la sécularisation, l’origine de tous nos maux. Je ne partage pas cet avis. Le christianisme ne peut pas être pleinement lui-même lorsqu’il est la religion hégémonique. Que l’Église traverse donc une crise est indéniable, mais affirmer qu’elle s’achemine vers sa fin est inexact. Elle a changé de statut et doit être à l’écoute des signes des temps pour repenser la façon d’accomplir sa mission. Je suis donc persuadé que la sécularisation offre à l’Église une place plus ajustée à ce qu’elle doit être...

( Cardinal J. De Kesel, archevêque de Malines-Bruxelles – vient de publier « Foi et religion dans une société moderne (éd. Salvator) – interview dans « La Libre » 26 05 21)

Réveille-toi, pourquoi dors-tu, Seigneur ?
Sors de ton sommeil, ne rejette pas sans fin.
Pourquoi caches-tu ta Face
et oublies-tu notre malheur et notre oppression ?
Lève-toi ! A l’aide !
Sauve-nous au nom de ta fidélité.


Psaume 44, 24
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